Article paru sur http://www.mieux-etre.org, le 06 février 2011. Pour voir l’article sur le site de Mieux-être.org, cliquez ICI.
Les états hypnotiques sont utilisés à des fins thérapeutiques par les chamanes, les sorciers, les guérisseurs, les hommes de religion, etc. depuis des temps immémoriaux et ce, partout dans le monde. Il faudra néanmoins attendre le 18ième siècle pour que les scientifiques occidentaux s’y intéressent. Franz-Anton Mesmer, le marquis de Puységur, l’abbé de Faria, James Braid, Auguste Liébault, Hippolyte Bernheim, Jean-Martin Charcot, Joseph Delboeuf et Pierre Janet, pour ne citer qu’eux, ont signé les premières heures de gloire de l’hypnose « médicale » avant que Sigmund Freud ne la condamne finalement au déclin. Dans les années 1890-1897, l’hypnose sera supplantée par une nouvelle méthode, la psychanalyse.
C’est à Milton Erickson, un psychiatre américain, que l’on doit sa renaissance dans les années ‘30 du 20ième siècle. Sa pratique et ses expérimentations l’ont mené à concevoir une hypnose « utilisationnelle », « naturaliste », « permissive » et « indirecte » dont s’inspire aujourd’hui une majorité d’hypnothérapeutes.
Qu’est-ce l’hypnose ?
L’état hypnotique ou transe hypnotique est essentiellement un état d’attention durant lequel notre esprit est tellement accaparé par une idée, des images internes, des sensations ou des émotions que nous sommes momentanément indifférents à la plupart des aspects de la réalité extérieure. Certaines fonctions psychiques sont mises en veilleuse au profit d’autres processus, notamment inconscients. En hypnose, nos perceptions ainsi que notre appréhension de la réalité sont modifiées, ce qui nous permet de fonctionner mentalement de façon différente et d’être plus ouverts sur nous-mêmes.
Le terme « hypnose » est issu du mot grec « hupnos » qui signifie « sommeil ». Contrairement à ce que sont étymologie pourrait laisser croire, l’hypnose n’est pas un sommeil mais un état de conscience modifiée.
L’électroencéphalogramme le confirme sans conteste, le tracé d’une personne en état hypnotique est différent de celui du dormeur et ne montre aucun des signes électriques de sommeil paradoxal ou de sommeil profond. La confusion entre sommeil et hypnose est à l’origine de malentendus préjudiciables pour la pratique actuelle de cette technique. En effet, l’hypnose évoque encore souvent un sommeil mystérieux, magique ou inquiétant et cette conception génère soit des attentes irréalistes (« Je veux que vous m’endormiez et que vous régliez tous mes problèmes durant mon sommeil hypnotique »), soit une méfiance exacerbée (« Vous allez m’endormir et m’assujettir à mon insu »).
L’hypnose est un état physiologique banal que nous connaissons tous. Si vous êtes automobiliste, vous aurez remarqué que lorsque vous êtes absorbé par un sujet qui vous préoccupe, vous pouvez conduire d’une manière automatique et ne pas remarquer le chemin parcouru. De même, vous avez peut-être déjà vécu un état second appelé « hypnose des autoroutes » lorsque vous circulez seul dans une ambiance silencieuse sur une route bordée d’arbres qui défilent à toute vitesse. Si vous êtes cinéphile ou passionné de littérature, il vous est probablement arrivé d’être « pris » par une histoire au point de ne pas entendre les propos d’une personne s’adressant à vous. Si vous êtes passionné d’informatique ou de jeux vidéo, vous savez comme il est facile d’oublier le temps qui passe. Vous avez aussi certainement « décroché » de la réalité extérieure dans une salle d’attente ou dans un hall de gare pour vous absorber en vous-même. Dans toutes ces situations, vous avez expérimenté une « transe quotidienne ordinaire ». Ces états ont en commun un déplacement spontané de notre attention vers des stimuli internes. Nous traversons ce type d’état hypnotique chaque jour toutes les 90 à 100 minutes. Ces transes communes sont liées au cycle ultradien qui rythme par ailleurs d’autres paramètres physiologiques. Durant ces phases, certaines parties de notre cerveau se mettent au repos tandis que d’autres sont activées permettant ainsi un fonctionnement différent nécessaire à l’organisation mentale des informations et des expériences vécues.
Tout le monde peut-il être hypnotisé ?
Au regard de ce qui vient d’être évoqué, il semble évident qu’à des degrés variables, chacun de nous soit capable d’expérimenter des états hypnotiques satisfaisants. L’hypnotisabilité est une donnée psychologique relativement stable qui dépend de l’hypnotisé et non de l’hypnotiseur. D’après les recherches, elle serait notamment liée à l’intelligence et à la capacité de l’imagination.
Le mythe de l’hypnotiseur tout-puissant
Certaines personnes craignent de perdre leur contrôle et d’être placées sous l’emprise de l’hypnotiseur. Cette croyance est le fruit des images véhiculées par les spectacles d’hypnose. L’hypnotiseur de scène tend à faire croire qu’il est dépositaire d’un pouvoir exceptionnel lui permettant de faire exécuter ou dire n’importe quoi à un spectateur. Ce pouvoir hypnotique est un leurre. Il s’agit par contre d’un vrai pouvoir de manipulation intellectuelle ! En réalité, aucun hypnotiseur ne peut vous forcer à exécuter ou à dire des choses que vous ne voulez pas. Loin d’induire la passivité, l’hypnose est un état actif dans lequel un certain nombre de phénomènes se produisent grâce à votre collaboration. Aucun praticien ne peut vous induire dans un état hypnotique si vous ne le voulez pas. Pour prendre une comparaison, on peut vous obliger à vous rendre au cinéma mais pas à regarder le film. Pour ne pas voir, il vous suffit de fermer les yeux. L’hypnose requiert donc votre participation. Vous restez présent et assistez à ce qui se passe en vous, même dans les transes profondes. Pendant qu’une partie de vous est engagée dans le travail hypnotique, une autre reste en position d’observateur. Par exemple, vous pouvez revivre un souvenir et les différentes sensations qui lui sont associées tout en restant conscient du contexte hypnotique de la reviviscence. La transe hypnotique peut être comparée à l’état d’attention du spectateur entièrement captivé par un thriller. Il ne dort pas mais tellement absorbé par le film qu’il se désintéresse du monde qui l’entoure (il est « dans » le film, il est « dedans ») mais garde néanmoins à l’esprit qu’il est dans une salle de cinéma.
Vous êtes seul à l’origine de vos états de conscience modifiée. Vous avez le contrôle sur votre comportement durant toute la séance. Le thérapeute n’est qu’un instrument qui, grâce à son savoir-faire, vous aide à faire émerger un processus dont vous gardez la maîtrise. Vous apprenez à lâcher prise en reprenant immédiatement le contrôle des opérations. L’hypnose thérapeutique n’a pas pour finalité de vous soumettre mais au contraire d’augmenter votre propre contrôle sur vous-même. Sachez aussi que vous n’accepterez de répondre aux suggestions que dans la mesure où celles-ci sont conformes à vos valeurs fondamentales. L’hypnothérapeute, on l’aura compris, n’a pas pour but d’imposer ses solutions mais d’explorer avec vous vos potentialités insoupçonnées et inutilisées. Dans cet état de conscience modifiée, vous mettez en branle des solutions nouvelles en utilisant les mots et les images du thérapeute d’une manière qui vous est pertinente.
Voici, s’il en était encore besoin, une dernière preuve, par l’absurde, de l’incongruité de ce mythe de l’hypnotiseur tout puissant : il est possible d’induire soi-même un état hypnotique en recourant à ses propres suggestions. C’est ce que l’on nomme l’autohypnose. Nous avons évoqué le fait que nous expérimentons des états de conscience modifiée dans notre vie quotidienne. Ceux-ci sont de type autohypnotique. L’autohypnose thérapeutique n’est que l’utilisation structurée de ce phénomène. Nous pouvons donc dire que l’hypnose est toujours par essence de l’autohypnose et que même lorsque nous recourrons à un thérapeute, celui-ci ne fait que nous guider vers la transe.
L’hypnose peut-elle être nocive ou dangereuse ?
Cette croyance répandue est fausse moyennant quelques réserves. En effet, l’action bénéfique de l’hypnose pourrait être mise en doute si elle ne comportait aucun danger. Le risque d’engendrer des troubles psychosomatiques ou psychiatriques ne peut être complètement écarté, bien que ceux-ci soient rares et transitoires.
On parle d’autohypnose négative pour décrire une perception négative de soi à l’origine du déclenchement de processus inconscients pathogènes. Des pensées négatives que le sujet aurait de lui-même situées hors de sa conscience habituelle et échappant à la critique, agiraient comme des suggestions puissantes. Ces autosuggestions seraient responsables de nombreux troubles, notamment sexuels. Par ailleurs, la psycho-neuro-immunologie nous apprend que l’esprit, par le biais d’émotions et d’attitudes mentales, peut jouer un rôle tout à fait significatif dans la genèse d’un dysfonctionnement corporel ou d’une maladie (cf. les maladies psychosomatiques, ou, suivant un concept plus récent, les maladies psycho-biologiques).
On ne peut donc rejeter complètement l’hypothèse qu’une suggestion faite par un hypnotiseur à un sujet en état de conscience modifiée puisse agir négativement sur celui-ci, que ce soit sur un plan physique ou psychologique. Cependant, remarquons que les conséquences néfastes de l’hypnose n’apparaissent que chez des personnes ayant un long passé médical et ayant déjà présenté des tendances psychotiques antérieurement.
L’hypnose n’est en fait ni plus ni moins dangereuse que tout autre forme de relation psychothérapeutique. Après des entretiens préalables, pratiquée par un professionnel qualifié, qui reste dans son cadre thérapeutique habituel, elle est au contraire un outil extraordinaire. En effet, l’état hypnotique offre au patient une expérience pendant laquelle les limitations habituelles de ses pensées sont provisoirement suspendues. Des croyances, des habitudes, des idées toutes faites acceptées depuis l’enfance peuvent bloquer les possibilités d’épanouissement ou d’adaptation. Or, ces frontières difficiles à franchir à l’état de veille habituel s’effacent lors de la transe et des réaménagements dans l’appréhension de la réalité deviennent possibles. Autrement dit, en hypnose, la perception de ce que nous vivons est modifiée ce qui nous permet d’être plus ouverts sur nous-mêmes et accessibles au changement.
Quels sont les processus mis en jeu par l’hypnose ?
D’une façon schématique, et avec toutes les réserves qu’impose cette simplification, il y aurait, dans la transe, une dépotentialisation du cerveau gauche et une activation de l’hémisphère droit. Selon les théories neurophysiologiques, chacun des hémisphères cérébraux apporte une appréhension différente de la réalité. Le cerveau gauche dominerait les activités d’éveil alors que le cerveau droit se manifesterait essentiellement pendant le rêve, la rêverie, l’activité artistique, la transe commune et l’hypnose. Dans cette optique, on admet que l’hémisphère droit est responsable des phénomènes inconscients et qu’il a une plus grande activité lorsque la conscience habituelle est modifiée. L’état d’hypnose est donc un phénomène physiologique naturel et banal et l’hypnose thérapeutique n’est que l’amplification de ce phénomène avec l’aide d’une autre personne.
Il peut être surprenant, à première vue, que cet état de lâcher prise soit l’occasion d’un meilleur contrôle personnel. Les données neurophysiologiques peuvent aider à comprendre ce phénomène. De nombreux problèmes psychologiques pourraient être compris comme l’application erronée d’approches rationnelles de l’hémisphère gauche sur des situations qui seraient mieux appréhendées par le cerveau droit. L’hypnose en stimulant de cerveau droit aiderait donc le sujet à résoudre ses difficultés grâce à ses propres solutions. En effet, ce dernier possède déjà en lui les ressources nécessaires mais il les méconnaît car elles sont hors de sa conscience habituelle.
A qui s’adresse l’hypnothérapie ?
L’hypnose offre un large choix d’outils thérapeutiques utilisés par des thérapeutes d’orientation diverse (cognitivistes, systémiciens, psychanalystes, praticiens EMDR, etc.). Elle permet d’atténuer et de faire disparaître des symptômes gênants (comportements inadéquats, douleurs, etc.) mais également d’identifier et de traiter leurs causes sous-jacentes. L’autohypnose, quant à elle, aide à réduire l’anxiété, à gérer le stress, à induire un état de relaxation et à redonner un sentiment de contrôle de soi.
Les techniques hypnotiques s’avèrent précieuses dans la thérapie des problèmes tant psychologiques que somatiques. Dans certains cas, elle constitue la méthode principale de traitement ; dans d’autres, elle est un complément efficace d’autres pratiques (EMDR, thérapie comportementale et cognitive, etc.).
Les désordres anxieux (stress, phobies diverses, anxiété généralisée, crises d’angoisse, spasmophilie, peur des examens, trac des artistes et des sportifs, troubles obsessionnels, etc.), les traumatismes psychiques (agressions physiques et morales, accidents, abus sexuels, etc.), les événements pénibles (deuil, séparation, difficultés professionnelles, etc.), la dépression, le manque de confiance et d’estime de soi, les tics, le bégaiement, les troubles du comportement alimentaire (anorexie, boulimie), les addictions (tabagisme, alcoolisme, toxicomanie), les troubles du sommeil et les problèmes sexuels d’origine psychogène (impuissance, éjaculation précoce, vaginisme, dyspareunie, etc.) sont quelques unes des indications psychologiques de l’hypnothérapie. Les techniques hypnotiques sont également utiles aux étudiants et aux sportifs dont elles renforcent la motivation et favorisent les capacités de concentration et d’apprentissage. Elles sont aussi un adjuvant précieux à la thérapie EMDR (stabilisation de l’état émotionnel). En Belgique, des entretiens sous hypnose sont proposés à des témoins et à des victimes de faits graves (tiger kidnapping, viols, meurtres, etc.) éprouvant des difficultés à restituer des faits (description d’un auteur, d’un véhicule, d’une plaque d’immatriculation, d’une arme, etc.) ou leurs circonstances (trajet, déroulement chronologique des événements, description d’un lieu, etc.).
Au niveau somatique, l’hypnose apporte un réel soulagement dans les douleurs chroniques (notamment, céphalées, migraines, névralgies, douleurs cancéreuses, etc.), l’asthme, les acouphènes (sifflements ou bourdonnements d’oreille), les ulcères, les colites, le psoriasis, l’eczéma, etc. Elle est également salutaire dans l’accompagnement des maladies graves telles que le cancer et le SIDA (diminution de l’anxiété, réduction des effets secondaires des traitements, amélioration du confort de vie, survie prolongée). Il convient cependant de dénoncer énergiquement les propos abusifs de certains charlatans qui estiment que l’hypnose peut se substituer aux thérapies médicales dans ces maladies graves et conduisent leurs patients vers une mort certaine. Signalons encore que certains dentistes et anesthésistes y recourent lors d’opération chirurgicale en lieu et place d’une anesthésie locale.
Quelles sont les contre-indications de l’hypnothérapie ?
Les troubles graves de la personnalité comme les psychoses sont considéré par la majorité des thérapeutes comme une contre-indication absolue. Toutes les personnes souffrant de pathologie organique recourant uniquement à l’hypnose comme forme de thérapie et refusant des traitements médicaux efficaces doivent aussi être écartées.
Quels sont les indices d’une transe hypnotique ?
Si certains signes sont évocateurs d’une transe hypnotique, aucun n’est cependant spécifique. Ils peuvent tous se rencontrer dans d’autres situations, très différentes les unes des autres. En effet, tout ce qui survient pendant l’hypnose constitue une potentialité de l’être humain et est susceptible d’apparaître spontanément. Par ailleurs, ces phénomènes sont variables d’une personne à l’autre et pour un même sujet, d’une séance à l’autre. Il n’y a donc pas d’expérience standard de l’état hypnotique, chacun ayant une personnalité et une histoire différentes.
Sans être exhaustive, citons :
-La suggestibilité. Elle est favorisée par l’état hypnotique. L’action des suggestions est le résultat d’un processus psychologique appelé l’idéodynamisme. L’idéodynamisme est la propriété des idées à se transformer de manière réflexe en mouvement, sensation ou émotion. La suggestion est le moyen de proposer une idée ; la suggestibilité, la faculté de l’être humain à accepter cette idée ; la réalisation de l’idée, la conséquence automatique de cette acceptation. Bien que la suggestibilité ne puisse rendre compte de tous les phénomènes hypnotiques, elle n’en reste pas moins un des phénomènes essentiels.
-Le littéralisme. Le patient répond au sens littéral des questions qui lui sont formulées. Il n’est pas rare, par exemple, qu’une personne réponde « oui » à la question : « Voulez-vous dire votre nom ? » plutôt que de donner son nom.
-La dissociation. Cette dissociation peut se manifester par un désintérêt ou un détachement vis-à-vis de l’environnement externe, par l’impression que le monde extérieur et/ou l’hypnothérapeute sont à grande distance, par le sentiment de vivre une expérience irréelle ou d’assister en spectateur aux événements, etc. La personne peut également éprouver la sensation qu’une partie d’elle est dans le passé de son souvenir tandis qu’une autre garde à l’esprit le contexte hypnotique de la reviviscence. Elle peut aussi ressentir sont corps comme étranger, celui-ci pouvant agir en dehors de sa volition (par exemple, lévitation d’un bras). Elle peut encore percevoir une division interne de sa personnalité entre conscient et inconscient, ce dernier pouvant « s’exprimer », par exemple, « en faisant revenir » des souvenirs.
-L’hallucination. Les hallucinations peuvent être visuelles, auditives, olfactives, gustatives ou kinesthésiques. Une personne peut, par exemple, éprouver toutes les sensations correspondant à une scène imaginaire : « voir » la mer, « entendre » le grondement du grand large, « sentir » l’odeur entêtante de la crème solaire, « goûter » le sel sur ses lèvres, « ressentir » le vent dans ses cheveux, etc. On parle d’hallucinations négatives lorsqu’elle ne perçoit pas un objet réel.
-La catalepsie. Il s’agit d’une suspension complète du mouvement volontaire des muscles. Le plus souvent, les patients présentent une catalepsie générale de tout le corps par relaxation. Ils ont l’impression de ne plus pouvoir mouvoir leur corps ou tout au moins, leurs membres. Plus rarement, ils peuvent manifester une catalepsie par contracture. Leur corps devient alors rigide par augmentation du tonus musculaire. Généralement, les hypnothérapeutes ne visent pas à produire ce phénomène chez leurs patients à l’inverse des hypnotiseurs de spectacle qui le recherche car il est très spectaculaire.
Si la catalepsie peut être généralisée à tout le corps, elle est cependant le plus souvent limitée à une partie de celui-ci. Par exemple, le bras du patient va conserver la position en lévitation dans laquelle le thérapeute l’a placé. La catalepsie des paupières se manifeste par l’impossibilité d’ouvrir les yeux durant la séance. La fixité du regard, fréquente lorsque la transe est induite par fixation, signe quant à elle une catalepsie oculaire (impossibilité de déplacer ses globes oculaires).
-La lévitation du bras. Le bras du patient s’élève de manière automatique puis reste suspendu en catalepsie sans intervention consciente ou volontaire de sa part.
-Les mouvements idéomoteurs. Il s’agit de mouvements involontaires ou automatiques des doigts ou de la tête, généralement plus lents et plus saccadés que les mouvements volontaires. Ils peuvent apparaître en réponse aux questions posées par l’hypnothérapeute. On parle alors de signaling idéomoteur. L’hypnothérapeute demande à l’inconscient du patient de soulever un doigt pour répondre par l’affirmative, un autre pour répondre par la négative.
-La relaxation. Généralement, en transe, le fonctionnement corporel semble « ralenti » (ralentissement de la respiration, diminution de la déglutition, abaissement du ton de la voix, ralentissement du rythme de l’élocution) et la relaxation musculaire ainsi que le bien-être corporel, favorisés. C’est cependant loin d’être toujours le cas. Lorsqu’une personne revit des événements difficiles, elle peut être extrêmement tendue et néanmoins être profondément en transe.
-Le somnambulisme. Si la majorité des patients présentent une immobilité progressive, d’autres par contre bougent, voire accomplissent certains mouvements en relation avec les scènes expérimentées durant la transe. Ils « hallucinent » tous les éléments de la situation et agissent comme s’ils la vivaient réellement. Par exemple, un patient peut lancer des coups de poing dans le vide parce qu’il se défend dans un souvenir revécu et guidé par le thérapeute.
-Les altérations sensorielles sont un phénomène habituel. Les plus courantes sont la lourdeur ou l’engourdissement du corps (en particulier des membres), des sensations de flottement ou de légèreté, des impressions de chaleur ou de fraîcheur, la sensation que le volume du corps se modifie (généralement, les mains ou les pieds), la perte de la sensation du positionnement des membres (par exemple, les patients ne sentent plus/ne savent plus comment sont placées leurs mains), l’anesthésie et l’analgésie.
-La distorsion temporelle. Il s’agit d’une modification de la perception de la durée du temps qui s’écoule. Par exemple, le patient peut éprouver le sentiment que la séance a été plus longue ou plus courte qu’elle ne l’a objectivement été.
-L’amnésie post-hypnotique. Parfois, le patient oublie en tout ou en partie ce qui s’est passé durant la séance d’hypnose.
-L’hypermnésie. Elle permet de retrouver des souvenirs, consciemment oubliés. Cependant, si l’hypnose permet de récupérer des éléments du passé, elle peut aussi créer de faux souvenirs. Cette capacité à modifier la mémoire est d’ailleurs utilisée au niveau thérapeutique, notamment pour créer des scénarii réparateurs.
-Autres petits signes fréquents, le larmoiement et une difficulté d’élocution.
Tout le monde ne peut réaliser tous ces phénomènes. Chacun peut être doué pour certains et pas d’autres mais l’hypnose permet le plus souvent d’en faire l’apprentissage ou de les cultiver. Chacun de ces signes peut avoir des dimensions thérapeutiques.
Comment se déroule une thérapie par hypnose ?
La thérapie débute par un, voire plusieurs entretiens préliminaires. Ceux-ci sont indispensables pour créer une interaction de qualité entre le thérapeute et vous. Par ailleurs, ils s’imposent par la nécessité de recueillir un certain nombre d’informations. Le praticien veille à récolter les éléments importants concernant votre vie et fait une anamnèse sérieuse de la problématique motivant votre demande de traitement. Ces entrevues préalables permettent donc d’établir un bilan qui précise l’indication de l’hypnose et, le cas échéant, sa contre-indication. Au-delà de ce bilan d’évaluation, cette étape préparatoire permet aussi de démystifier l’hypnose et de répondre à vos questions. Il s’agira principalement de vous rassurer si vous êtes inquièt et de vous raisonner si vous attendez de cette technique des effets magiques et instantanés, vous débarrassant de tout effort personnel. Lorsque les conditions sont réunies, l’hypnothérapie proprement dite peut commencer.
Aucun décorum n’est nécessaire pour la pratique de l’hypnose. Le thérapeute veille simplement à ce que l’ambiance soit calme et propice à la détente.
La séance d’hypnose proprement dite débute par une induction. L’induction n’est rien d’autre qu’une technique qui vous aide à entrer dans un état de focalisation intérieure. Les méthodes d’induction sont très nombreuses et ont pour point commun de fixer l’attention que ce soit sur un objet (un objet que vous choisissez librement dans la pièce, une croix ou un point dessiné sur une de vos mains, etc.), des sensations physiques (par exemple, la lourdeur progressive du corps ou la respiration) ou des images mentales (par exemple, un souvenir). L’induction par relaxation avec prise de conscience des sensations corporelles ou l’accompagnement dans un souvenir agréable sont des façons de faire simple et qui se révèlent souvent efficaces. Le praticien vous demande de vous concentrer de façon maximale afin de rendre le souvenir de plus en plus vivide. Pour ce faire, il vous aide à « voir », « entendre » et « sentir » les différents aspects de la situation. Vous êtes absorbé par votre souvenir de sorte que vous oubliez ce qui vous entoure. Votre esprit conscient habituel « décroche » et l-votre inconscient émerge. Les inductions des premiers états hypnotiques sont en moyenne d’une quinzaine de minutes. Cependant, cette durée se réduit le plus souvent d’une façon notable au fur et à mesure des séances.
Il arrive souvent lors des premières séances d’hypnose que le patient n’ait pas l’impression de vivre une expérience particulière et il lui faudra un certain apprentissage pour accéder à des états plus profonds. Notons cependant que la profondeur de la transe n’est pas nécessairement un critère de qualité. Des résultats thérapeutiques étonnants peuvent être constatés à la suite d’expériences hypnotiques superficielles. On peut comparer le travail psychologique à la natation. On peut nager aussi bien dans la petite et dans la grande profondeur d’une piscine. De même, on peut réaliser un travail de qualité aussi bien dans une transe légère que dans un état hypnotique profond.
L’état hypnotique étant induit, des idées thérapeutiques et des solutions créatives vont vous être présentées grâce aux suggestions et aux métaphores. En hypnose ericksonienne, contrairement à l’hypnose traditionnelle, la suggestion n’est pas un ordre mais une possibilité de faire une expérience nouvelle dans une attitude de disponibilité. Suggérer quelque chose à une personne n’est donc pas la condamner à y obéir. Une suggestion n’est qu’une suggestion et votre inconscient est libre de la refuser ou de l’accepter, en partie ou totalement. Le thérapeute n’a pas pour but de vous inculquer des solutions toutes faites mais de vous permettre de faire émerger vos propres aptitudes internes. Les métaphores sont des histoires, des contes, des anecdotes porteuses d’un sens apparent qui capte l’attention consciente et d’un sens caché proposant des solutions à votre problématique. L’action des suggestions et des métaphores est le résultat d’un processus psychologique appelé l’idéodynamisme. Ce phénomène naturel active les idées à se transformer en acte ou en sensation (comme l’évocation d’un citron en bouche peut provoquer une salivation).
Dans certains cas, le thérapeute peut mener des séances interactives dans lesquelles votre inconscient est « questionné » ou directement mobilisé pour solutionner une problématique spécifique. Citons parmi d’autres la technique de l’affect bridge (pont affectif) et celle du somatic bridge (pont somatique) utilisées respectivement pour connaître l’origine d’un problème psychologique et d’une maladie organique. Certains souvenirs douloureux peuvent faire l’objet d’un scénario réparateur. Le thérapeute vous aide à revivre en hypnose les scènes pénibles et à les transformer de sorte que vous puissiez les expérimenter avec les ressources dont vous avez manqué alors. Mentionnons encore la régression en âge, utile pour retrouver des moments problématiques du passé et la progression dans le futur qui vous aide à vous projeter dans un avenir débarrassé du problème. Notons cependant que ce type de séance nécessite un thérapeute expérimenté et que vous puissiez accèder à des transes de bonne qualité.
L’achèvement d’une hypnose se fait progressivement. Après avoir fait des suggestions post-hypnotiques positives de détente et de bien-être, le praticien accompagne le « réveil » en comptant (par exemple, de 0 à 10) et en vous demandant de remonter progressivement à chaque chiffre énoncé.
Evelyne Josse
Psychologue clinicienne, psychothérapeute en consultation privée (hypnose éricksonnienne, EMDR, thérapie brève Palo Alto, EFT), consultante en psychologie humanitaire, expert en hypnose judiciaire auprès de la Justice belge et formatrice. Evelyne Josse est l’auteur du livre Le pouvoir des histoires thérapeutiques. L’hypnose éricksonienne dans la guérison des traumatismes psychiques, La Méridienne/Desclée De Brouwer publié en 2007. Elle a également écrit Le traumatisme psychique chez le nourrisson, l’enfant et l’adolescent, de Boeck, coll. « Le point sur » paru en 2011 et Interventions en santé mentale dans les violences de masse, écrit en collaboration avec Vincent Dubois, publié en 2009, de boeck