Évelyne Josse, Christophe Baliko, Avec l’aimable relecture de Zoë Dubus
Dans Hegel 2023/1 (N° 1), pages 2 à 16
« De même qu’un seul événement horrible peut durablement modifier notre fonctionnement cérébral, une expérience spirituelle – pas nécessairement euphorique, certaines sont difficiles – peut être correctrice, fondatrice, transformatrice » Dr Stephen Ross
Introduction
Les études sur les effets thérapeutiques des psychédéliques dans le traitement des syndromes psychotraumatiques sont en pleine expansion. Ces substances constituent probablement la percée thérapeutique potentielle la plus remarquée de ces dernières années dans le domaine de la psychotraumatologie.
La psychothérapie est généralement préconisée comme traitement de première intention pour les syndromes psychotraumatiques. L’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM) et la Haute Autorité de Santé (HAS) conseillent spécifiquement les TCC et l’EMDR [1, 2]. L’HAS reconnaît également les bénéfices de l’hypnose. L’Organisation Mondiale de la santé (OMS) recommande, quant à elle, les TCC, individuelles ou en groupe, axées sur le traumatisme, l’EMDR et la gestion du stress [3]. Dans une méta-analyse, Bradley et ses collaborateurs ont constaté que les différentes thérapies axées sur le traumatisme ont une efficacité comparable ; l’amélioration clinique est probante chez 44 % des patients [4]. Celles-ci se révèlent plus efficaces à réduire les symptômes du trouble de stress post-traumatique que les psychothérapies n’abordant pas spécifiquement le contenu traumatique [5]. Toutefois, selon différentes études, entre 28 et 68 % des patients interrompent le processus thérapeutique en cours de traitement [6, 7].
En ce qui concerne les traitements administrés par voie orale, comme le rappelle l’HAS, la paroxétine est la seule molécule ayant une autorisation de mise sur le marché (AMM), en France, dans l’indication du trouble post-traumatique. En cas d’échec de la paroxétine, les médicaments utilisés, hors AMM, sont les autres inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) (sertraline, fluoxétine, fluvoxamine) ou les antidépresseurs tricycliques (amitriptyline, imipramine). La paroxétine et la sertraline sont les deux molécules approuvées par la Food and Drug Administration (FDA), aux États-Unis, pour le traitement du TSTP. Cependant, les ISRS se sont avérés avoir peu d’effet sur les symptômes psychotraumatiques [8] et sont donc recommandés par l’OMS comme traitement de deuxième ligne [3]. Il ressort des méta-analyses que seule la paroxétine, évaluée dans trois essais cliniques de phase 3, fait mieux que le placebo [8]. La sertraline, évaluée dans quatre essais de phase 3, reste sans effet significatif dans deux études, et dans les deux autres, elle n’est efficace que sur les femmes et non sur les hommes [9]. Non seulement l’efficacité pharmacothérapeutique est faible à modérée [10], mais le taux d’abandon est élevé, 11,7 % chez les sujets sous paroxétine et 28 % chez les sujets sous sertraline [9]. Dans une méta-analyse comparant l’efficacité des traitements pharmacologiques du trouble de stress post-traumatique, la phénelzine, un inhibiteur de la monoamine oxydase (IMAO), s’est révélée plus efficace que près de la moitié des autres antidépresseurs et comptabilise significativement moins d’abandons que le placebo [10]. La mirtazapine, un antidépresseur quadricyclique, s’est montrée relativement efficace, mais plus de 50 % des sujets ont interrompu le traitement.
Dans une revue systématique évaluant la psychothérapie par rapport à la pharmacothérapie, les psychothérapies axées sur le traumatisme ont des effets plus importants et plus durables que les médicaments [10, 11]. Cependant, une méta-analyse, parue en 2020 dans la revue Psychiatry Research, conclut qu’en raison de biais dans les études comparatives, les preuves sont actuellement insuffisantes pour déterminer laquelle des deux options, pharmacothérapie par ISRS ou psychothérapie axée sur le traumatisme, constitue le traitement le plus efficace pour réduire les symptômes du TSPT [12]. Néanmoins, les taux importants d’abandon en cours de traitement, tant médicamenteux que psychothérapeutique, de l’ordre de 30 %, et le nombre de personnes continuant à souffrir d’un syndrome psychotraumatique malgré une ou plusieurs tentatives de prise en charge, entre 25 à 50 % selon les études, indiquent à l’évidence que l’offre de soins actuelle ne répond pas aux besoins de nombreux patients [13, 14, 15, 16, 17].
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Disponible sur le réseau CAIRN.