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Comment bien consommer les médias d’information en ces temps de guerre en Ukraine ?

En tant que consommateur, nous avons une responsabilité dans la manière dont nous nous informons. En ces temps agités, il nous revient d’être vigilants. Voici quelques conseils pour bien consommer les médias d’information.

– Évitez de devenir dépendant des actualités. Limitez-vous à consulter les informations une à deux fois par jour, au maximum trois fois. Il en va de votre santé mentale. L’hyperconsommation d’une information quasi-unidimensionnelle n’accroît pas votre connaissance des faits. Mais à force d’être répétée, cette information forge la manière dont vous percevez la réalité. Elle vous entraîne dans un monde où l’insécurité réelle ou imaginaire sourd de toute part.

– Évitez les images télévisuelles de la guerre dont la puissance émotionnelle peut être délétère. Vous abreuver d’images choquantes de destructions, de blessés ou de morts ne vous donne pas plus d’informations pertinentes que ne le fait la presse écrite. Les images transmises sans le moindre différé ont des effets désastreux. Diffusées en direct, sans être accompagnée d’une réflexion, elles sont propices à l’éclosion de l’angoisse. Une information anxiogène perturbe la conscience critique plutôt qu’elle ne l’avive. L’émotion intense qu’elle suscite court-circuite les processus cognitifs et suspend le raisonnement.

– Il est certes difficile de résister à la tentation de regarder les journaux télévisés. Toutefois, les émissions de fond et les débats que proposent les chaînes de télévision et les radios devraient être préférées aux actualités. Elles offrent davantage de recul et proposent des grilles de lecture. Elles rendent compte des faits, mais elles ont aussi pour ambition de les expliquer, de les analyser et de les mettre en perspective.

– Préférez la radio et la presse écrite à la télévision. Les chercheurs et les experts spécialistes des zones conflictuelles au cœur de l’actualité prennent plus souvent la parole à la radio et dans la presse qu’à la télévision.

– Croisez vos sources d’information. Soyez attentif aux dissonances éventuelles entre rédactions. Vous pourrez peut-être identifier certains journalistes plus compétents, plus expérimentés et ayant davantage de connaissances sur les zones en conflit.

– Traitez avec circonspection les informations offertes par les sites, blogs, réseaux sociaux, SMS, etc. L’information est diffusée rapidement et partout dans le monde. Le réseau informatique agit comme une caisse de résonance des informations erronées, des contre-vérités et des théories conspirationnistes. Les gens transfèrent l’information en la modifiant ou sans en vérifier l’authenticité. Les jeunes sont particulièrement vulnérables, car internet et les réseaux sociaux sont leur principale source d’information.

– Rester vigilant et évitez de prendre des décisions hâtives. Certains sites font de la propagande et encouragent les Européens à rejoindre les rangs de l’armée ukrainienne. Emportés par l’émotion, dans un élan de solidarité, des occidentaux récoltent de vivres et des vêtements pour venir au secours des populations civiles, d’autres, en majorité des hommes jeunes sans expérience des armes et sans lien personnel avec l’Ukraine, s’engagent dans le conflit sur un coup de tête. La guerre en Ukraine fait l’objet d’une couverture médiatique importante. De nombreux conflits armés ravagent la planète, mais l’Ukraine est à nos portes. Dans le jargon médiatique, on parle de mort-kilométrique ou de mort-kilomètre pour désigner le fait que les médias accordent une importance accrue aux victimes d’un drame en fonction de la distance qui les sépare du téléspectateur, de l’auditeur ou du lecteur. Des morts proches géographiquement sont plus couvertes que celles survenant à l’étranger et des morts dans un pays développé sont plus couvertes que celles dans un pays en développement. Ne vous laissez pas manipuler par vos émotions suscitées par le traitement médiatique d’un conflit. Les réseaux sociaux jouent également un rôle important dans l’émotion éprouvée par les consommateurs de l’information. En effet, ils nous connectent aux fils d’actualité de personnes très proches des faits et dont les témoignages ont une portée émotionnelle puissante. Quelle que soit la révolte que ce conflit soulève en vous, prenez le temps de réfléchir avant d’agir.

– Après avoir regardé les informations, il est essentiel de revenir à la réalité quotidienne, de revenir à la routine quotidienne rassurante.

Articles de la série

Josse E. (2022), Face aux médias en ces temps de guerre en Ukraine. http://www.resilience-psy.com/spip.php?article527

Josse E. (2022), Catastrophe et crise humanitaires, définition. http://www.resilience-psy.com/spip.php?article526

Références bibliographiques

Josse E. (2019), Le traumatisme psychique chez l’adulte, De Boeck Université, coll. Ouvertures Psychologiques.

Josse E. (2019), Le traumatisme psychique des nourrissons, des enfants et des adolescents, De Boeck Université, Coll. Le point sur, Bruxelles

Josse E., Dubois V. (2009), Interventions humanitaires en santé mentale dans les violences de masse, De Boeck Université, Bruxelles.

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