Déceler les violences sexuelles faites aux enfants

La problématique des violences sexuelles infantiles concerne tous les intervenants potentiels auprès des enfants (personnel médical, corps enseignants, éducateurs, voisins, parents, etc.). Pour qu’ils soient en mesure de les déceler, il faut qu’ils les suspectent et qu’ils puissent en reconnaître les manifestations. Cet article a pour but de les aider à en repérer les signes d’alerte.

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Déceler les violences sexuelles faites aux enfants


Auteur : Evelyne josse

Avec l’aimable collaboration de Francine Dal, psychologue spécialiste de la maltraitance infantile et Marie Bruyns, docteur en gynécologie

2007

evelynejosse@yahoo.fr

http://www.resilience-psy.com

14 avenue Fond du Diable, 1310 La Hulpe, Belgique

Psychologue clinicienne. Hypnose éricksonnienne, EMDR, thérapie brève
Psychothérapeute en consultation privée, psychologue du programme ASAB, expert en hypnose judiciaire, consultante en psychologie humanitaire

Référence du présent article : « Déceler les violences sexuelles faites aux enfants », Evelyne Josse, 2007, http://www.resilience-psy.com

INTRODUCTION

Le médecin légiste français Ambroise Tardieu est le premier à avoir alerté ses confrères par rapport aux mauvais traitements et aux violences sexuelles infligées aux enfants. En 1867, il publie un article sur les sévices subis par 339 fillettes de moins de 11 ans, victimes de tentatives de viols ou de viols avérés. Ces travaux resteront sans effet, tant au niveau des sociétés savantes que des pouvoirs publics. Il faudra attendre les années ’70 du siècle dernier pour que s’initie une véritable prise de conscience. Néanmoins, le déni qui a longtemps occulté cette réalité n’a pas complètement disparu.

Les violences sexuelles exercées contre les enfants 1 ont de profondes répercussions à court et long terme sur leur santé physique, leur développement psychologique et leur bien-être psychosocial.

Les intervenants auprès des jeunes victimes doivent être capables de reconnaître les signes physiques évocateurs d’une violence sexuelle tels que lésions, infections, etc. Ils doivent également pouvoir établir un diagnostic différentiel et être à même de déterminer leur nature (par exemple, lésions dues à une chute, infections transmises de la mère à l’enfant, contamination accidentelle, etc.). Notons cependant que dans de nombreux cas, les agressions sexuelles n’entraînent pas de séquelles physiques. En effet, les abus sont fréquemment commis par des proches sans recours à la violence physique. De plus, les maltraitances sexuelles perpétrées contre les enfants ne se limitent pas à la pénétration vaginale ou anale mais englobent aussi les attouchements, les simulations d’acte sexuel, les fellations forcées, etc.

Les intervenants doivent être attentifs aux indices de souffrance psychique manifestée par les victimes. L’expression de cette souffrance prend des formes diverses selon l’âge de l’enfant, sa personnalité et ses antécédents, la durée et la fréquence des abus ainsi que l’identité de l’agresseur et la proximité relationnelle qu’il entretient avec la victime. Plus de 30% des enfants ne manifestent pas de réactions préoccupantes au moment des faits. En aucun cas, cette absence de symptômes ne signifie qu’ils ne souffrent pas, qu’ils ne présenteront pas ultérieurement des troubles ou qu’ils n’ont pas besoin d’aide. En effet, même si leur douleur n’est pas apparente, certains souffrent néanmoins de troubles affectifs profonds que l’on peut nommer « traumatisme silencieux ». Certains verront d’ailleurs leur état psychique se dégrader après un temps de latence traumatique de plusieurs mois, voire de plusieurs années. En effet, le traumatisme sexuel peut avoir des « effets dormants » 2 et surgir soudainement, notamment à la faveur d’événements personnels ou familiaux (premiers émois amoureux, premières relations sexuelles, mariage, naissance, reportage télévisé, rêve, querelle et séparation familiale, etc.). Dans près de 60% des cas, les enfants manifestent leur souffrance par le biais de signes somatiques, comportementaux et psychologiques qui peuvent s’associer ou se succéder dans le temps. Ces réactions n’ont guère de spécificité pathognomonique et aucun signe pris isolément n’atteste à coup sûr d’une agression sexuelle. En effet, certains enfants présentent des réactions que l’on peut juger préoccupantes alors qu’ils n’ont pas subi de maltraitance ou d’abus. De plus, il est malaisé de distinguer les troubles relevant d’un traumatisme spécifiquement sexuel des réactions manifestées suite à d’autres événements traumatogènes ou potentiellement perturbant tels que la maltraitance physique ou morale, la négligence grave, un deuil, une séparation familiale, etc.

C’est la conjonction, la répétition, l’accumulation, la cohérence et la permanence d’indices physiques et de signes en rupture avec le comportement antérieur de l’enfant qui permettront de confirmer ou d’infirmer le diagnostic d’agression sexuelle.

La problématique des violences sexuelles infantiles concerne tous les intervenants potentiels auprès des enfants (personnel médical, corps enseignants, éducateurs, voisins, parents, etc.). Pour qu’ils soient en mesure de les déceler, il faut qu’ils les suspectent et qu’ils puissent en reconnaître les manifestations. Cet article a pour but de les aider à en repérer les signes d’alerte.

LES ALLEGATIONS DE VIOLENCES SEXUELLES

1. L’ampleur du problème

Les données disponibles sur les violences sexuelles faites aux enfants proviennent de la police et des instances juridiques, des services médicaux, des organisations non gouvernementales (Droits de l’Homme, organismes humanitaires, etc.), des associations internationales, nationales et locales (associations contre la violence, collectifs de femmes, associations pour les Droits de l’enfant, etc.), d’enquêtes et d’études diverses. Les données recensées par ces différentes sources sont cependant souvent incomplètes et ne révèlent que la partie émergée de l’iceberg. D’après Duboc, 7% seulement des agressions sexuelles perpétrées contre les enfants seraient connues d’une instance compétente. Lorsqu’elles le sont, c’est généralement à la faveur d’un bouleversement dans la vie de l’enfant et de sa famille (actes délinquants, grossesse, infection sexuellement transmissible, troubles psychiatriques, altercation familiale, divorce, fugue, etc.).

Les violences sexuelles constituent la première cause de maltraitance infantile. Dans les pays occidentaux, leur nombre semble s’accroître alors que la prévalence des autres formes de violence semble stable 4 . L’enfant dénonce plus facilement la maltraitance sexuelle si une autre victime signale une violence similaire commise par le même auteur, si l’agresseur est étranger au cercle familial ou si on lui pose des questions directes au sujet d’agressions possibles.

La crédibilité des déclarations de violences sexuelles faites par les enfants est parfois mise en doute par la famille et les professionnels. Sans nous étendre sur le sujet, signalons que les allégations mensongères sont extrêmement rares 5 , certains enfants rétractant même des révélations véridiques lorsqu’ils ne se sentent pas soutenus, écoutés ou compris. En tout état de cause, les enfants taisent, voire dénient, plus fréquemment une agression à caractère sexuel qu’ils n’avancent de fausses déclarations.

LES FREINS AU DEPISTAGE DES VIOLENCES SEXUELLES

La méconnaissance de la prévalence des violences sexuelles faites aux enfants relève de caractéristiques inhérentes aux contextes de perpétration, de variables propres aux jeunes victimes ainsi que de facteurs liés aux intervenants potentiels 6 .

1. Facteurs propres au contexte

– Les contextes violents nimbés de secret ou en marge de la société. Les violences sexuelles sont souvent méconnues des services compétents en raison du contexte dans lequel elles se déroulent : réseaux clandestins (prostitution infantile, traite des êtres humains), cadre familial fermé, milieux institutionnels résidentiels (institutions vouées à la protection de l’enfance et au système judiciaire juvénile, orphelinats, établissements pour enfants handicapés ou présentant des troubles psychiatriques, etc.), centres de détention, monde de la rue (population des rues désocialisées), etc. Les victimes vivant souvent à proximité, voire avec leur bourreau (dont ils peuvent être dépendants pour leur survie), n’ont pas ou peu de possibilités de dénoncer les violences dont elles sont l’objet.

– La culture. Les tabous culturels sont un frein considérable aux révélations d’agression à caractère sexuel. En effet, dans la majorité des sociétés, évoquer la sexualité provoque des sentiments de gêne et de honte, autant pour le locuteur que pour son confident. De plus, dans de nombreux pays, les enfants ne sont pas encouragés à parler d’eux-mêmes ou à exprimer leurs difficultés.

Dans certaines cultures, les violences sexuelles faites aux enfants sont tolérées (par exemple, l’esclavage sexuel des enfants domestiques), voire considérées comme des pratiques acceptables (par exemple, les viols et les relations sexuelles contraintes dans le cadre des mariages précoces, etc.) Pour 8 . Aussi, certains enfants plus âgés peuvent-ils manquer de compétences sociales « normales ». En effet, communiquer est une compétence sociale qui s’apprend. Certaines circonstances et certains milieux défavorisent cet apprentissage.

Les jeunes enfants sont donc dans l’impossibilité de signaler les agressions sexuelles dont ils sont l’objet (absence de langage, manque de vocabulaire). Ils peuvent aussi ne pas en percevoir le caractère abusif ou violent. Les faibles connaissances des jeunes enfants ne leur permettent pas de l’évaluer lorsqu’elles ne sont pas accompagnées de violence physique (coups, blessures, etc.), ce qui est généralement le cas lors d’abus intrafamiliaux. Se référant aux connaissances et à l’autorité morale des adultes, ils ne mettent pas en cause la probité des actes posés par l’agresseur. C’est souvent à la puberté ou à l’adolescence qu’ils prennent conscience de la signification et de la gravité des faits. Cependant, soulignons que même les adolescents ne détectent pas tous la violence de la même manière. Par exemple, Koss et al. 10 . Généralement, les jeunes victimes s’adressent encore davantage de reproches lorsqu’elles ont éprouvé du plaisir sexuel. Dans les cas d’inceste père-filles, l’impression d’avoir trahi leur mère peut majorer leur souffrance.

– La proximité affective avec l’abuseur. Il est malaisé pour les enfants de dévoiler des abus lorsqu’ils entretiennent des relations affectives étroites avec l’abuseur ou lorsqu’ils sont dépendants de lui pour leur survie.

– La peur des conséquences du dévoilement. La révélation d’une agression sexuelle subie par un enfant a de nombreuses conséquences pour sa famille (au niveau émotionnel, fonctionnel, structurel, etc.), voire même pour la collectivité dans son ensemble (entourage, école, pays 11 ). Les victimes en âge d’envisager ces répercussions peuvent les redouter tant pour elles-mêmes (par exemple, placement en institution ou en famille d’accueil, mise sous tutelle du Juge de la Jeunesse, rejet affectif ou colère de la part des membres de la famille, rejet du foyer familial, mariage forcé avec l’abuseur, crime d’honneur 12 , impossibilité de se marier, etc.) que pour leurs proches (éclatement du groupe familial, stigmatisation par la communauté). Elles peuvent également s’inquiéter des conséquences pour l’agresseur, notamment lorsque l’abus est intrafamilial (écartement de la famille, garde à vue, incarcération, suicide, assassinat commis par un membre de la famille de la victime en guise de représailles, etc.).

– La crédibilité des victimes. La crainte de ne pas être entendues par leur entourage peut conduire les jeunes victimes à taire les violences ou à en différer la divulgation. Cette appréhension peut être totalement justifiée. En effet, certaines cultures (par exemple, en Afrique ou en Asie) et sub-cultures (classes sociales) prêtent peu de crédit aux dires des enfants. Même les familles les plus ouvertes peuvent être incrédules face aux dévoilements de faits dépassant leur entendement. En cas d’abus intrafamiliaux, il n’est pas rare que l’entourage dénie fermement les maltraitances révélées. De plus, les adolescentes dévoilent souvent les abus lorsqu’elles sont en conflit avec l’abuseur (père, beau-père, etc.) ou déjà devenues délinquantes, ce qui les décrédibilisent aux yeux de leurs proches (notamment, de leur mère).

Les enfants peuvent également redouter une confrontation avec l’auteur, mieux armé pour se défendre. Lorsque ce dernier nie les faits, les victimes risquent d’être accusées de mensonge, de méchanceté ou de malveillance. Dès lors, révéler les abus peut leur apparaître comme plus hasardeux que de les taire.

Les premières déclarations des enfants concernant les maltraitances dont ils sont ou ont été victimes sont parfois confuses ou parcellaires et peuvent ne pas refléter précisément les faits. Par ailleurs, bien que ce qu’ils révèlent soit important, ils peuvent laisser entendre qu’il s’agit de faits anodins. De plus, ils dévoilent généralement les agressions de manière graduelle, voire même se rétractent ou dénient des allégations véridiques. Les personnes non averties sont souvent peu enclines à prêter foi à ces dénonciations balbutiantes.

– L’absence d’une personne de confiance. Les enfants ne dévoilent les maltraitances sexuelles qu’à une personne de confiance. Or, lorsqu’ils ont été abusés ou violentés par une personne censée assurer leur protection, leur bien-être ou leur éducation (parents, éducateur, enseignant, baby-sitter, religieux, etc.), ils peuvent douter de la bienveillance des adultes, y compris de ceux auxquels ils pourraient utilement se confier.

En raison de leur jeune âge, ils ignorent généralement l’existence des recours à leur disposition. S’ils pensent ne pouvoir être aidés ou secourus, ils peuvent juger inutile, voire imprudent, de dénoncer les violences dont ils sont l’objet.

– Le handicap. Les difficultés des enfants handicapés à comprendre la situation (du fait de la carence de leurs capacités cognitives, de la pauvreté de leur imagination, de délires, etc.) et à la communiquer (à cause d’une mutité, d’une absence de langage ou de troubles de la personnalité) rend peu probable la dénonciation des faits.

– Un continuum de violence. Pour certains enfants, les agressions sexuelles s’inscrivent dans un continuum de violence verbale, physique et psychologique. C’est notamment le cas des enfants vivant en rue. Outre le fait que leur désocialisation leur barre l’accès à la majorité des services compétents, il leur est malaisé d’isoler la maltraitance sexuelle des autres aspects de la violence qu’ils subissent. Il en est de même pour les jeunes domestiques sexuellement asservis par leur patron et pour les enfants abusés par des parents violents.

3. Facteurs propres aux intervenants potentiels

– Le tabou de la sexualité. Les intervenants peuvent vouloir éviter d’aborder un sujet sensible. En effet, dans tous les pays, la sexualité cristallise de nombreuses valeurs et de multiples tabous, en particulier lorsqu’elle concerne les enfants.

– Le domaine privé. Les relations sexuelles et l’éducation des enfants sont d’ordre privé. Les étrangers au cercle familial (professionnels, amis, voisins, etc.) peuvent être mal à l’aise de s’ingérer dans l’intimité domestique et l’autorité parentale.

– Le contexte. Les intervenants peuvent considérer que les agressions à caractère sexuel sont inhérentes au contexte (guerre, camps de réfugiés, monde de la rue, etc.) et ne pas leur accorder une attention spécifique.

– Les émotions des intervenants. Les situations dramatiques impliquant des enfants suscitent de fortes réactions émotionnelles. Les intervenants s’en protègent parfois inconsciemment en négligeant involontairement les signes d’alerte.

– La promesse du secret. Dans certains cas, l’enfant révèle sa victimisation auprès d’une personne de confiance (travailleur social, enseignant, éducateur, amis, etc.) à laquelle il impose généralement de garder le silence. Désemparé par de telles déclarations, le confident respecte parfois le vœu de l’enfant.

– Les conséquences d’un dévoilement. Le dépistage de faits graves provoque des bouleversements familiaux (placement de l’enfant, éclatement de la cellule familiale, enquête, procès, etc.) et entraîne la prise de mesures diverses (examens médicaux, entretiens psychologiques, enquête, etc.). Les intervenants peuvent être embarrassés de déclencher un tel chambardement et se montrer hésitants à émettre leurs soupçons tant qu’ils n’ont pas récolté de preuves tangibles.

– La crainte des réactions de l’entourage. En cas de dévoilement d’abus intrafamilial, les intervenants peuvent craindre la réaction des parents ou de la famille élargie (vengeance, agression, colère, déni, etc.).

– Le manque de formation des intervenants professionnels. Dans de nombreux pays, le personnel médical, paramédical et enseignant est insuffisamment formé au dépistage, à la prise en charge et au soutien des jeunes victimes.

– La crainte de porter préjudice à l’enfant en dénonçant les faits. Dans de nombreux pays, les structures judiciaires et/ou thérapeutiques aptes à répondre aux besoins des enfants maltraités sont inexistantes, inappropriées ou insuffisantes. Dès lors, l’intervenant peut appréhender (à juste titre) qu’une dénonciation soit non seulement inefficace à faire cesser les agissements de l’abuseur mais qu’en plus, elle s’avère dangereuse pour l’enfant victime (vengeance de l’agresseur sur l’enfant).

LES SIGNES FAISANT SUSPECTER UNE AGRESSION SEXUELLE

Les indices évocateurs d’une agression sexuelle couvrent un large éventail de signes cliniques, de manifestations physiques, émotionnelles et comportementales et s’étendent de troubles discrets à des symptômes massifs.

1. Les signes relevant de la santé

1.1. Les signes fortement suspects de violence physique

1.1.1. Violence physique et violence sexuelle

– Un contexte de violence physique chronique. Il est fréquent qu’un enfant victime d’une agression sexuelle soit exposé à des violences d’une autre nature. En effet, le plus souvent, les individus ou un groupe d’individus sont vulnérables à divers types de violence (par exemple, à la violence sexuelle, physique et psychologique). Ainsi, par exemple, les familles à interactions violentes sont plus susceptibles que les autres de maltraiter sexuellement leurs enfants. En cas de suspicion de maltraitance physique, les intervenants devront donc être attentifs aux éventuels indices de violence sexuelle.

– Les signes de la violence physique commise au moment de l’agression sexuelle. Les marques de violence physiques peuvent résulter de la contention forcée de la victime durant l’agression sexuelle et de ses tentatives pour se protéger ou se défendre.

1.1.2. Types de lésions

On retiendra que plus l’enfant présentant une des lésions listées ci-dessous est jeune, plus la probabilité qu’il ait été maltraité est élevée.

– Les lésions de la peau. Les plaies 13 (contusions, brûlures, ecchymoses, hématomes, griffures, morsures, lacérations, alopécie provoquée par arrachement brutal des cheveux) et les cicatrices (lésions d’anciennetés diverses) sont significatives d’une agression physique lorsqu’elles sont disséminées sur tout le corps de l’enfant et ce, quel que soit son âge. Elles sont également suspectes lorsqu’elles concernent des zones corporelles non habituellement exposées aux chutes banales chez un enfant en âge de marcher.

Les localisations suspectes de maltraitance à tout âge sont le thorax, le dos, le siège, les organes génitaux, la face postérieure des cuisses, les oreilles, l’angle de la mâchoire, l’apophyse mastoïde 14 , les joues, la lèvre supérieure, le frein de la langue ou des lèvres (gavage forcé), le cou (traces de strangulation), la nuque, la face antérieure des avant-bras (protection contre les coups), les épaules, les bras (contention forcée) et la face dorsale des mains.

Les zones les plus souvent touchées lors d’une chute banale chez l’enfant en âge de marcher sont le front, les tempes, le nez, le menton, les hanches, le bassin, les genoux, les tibias, les coudes, la face postérieure des avant-bras et la paume des mains. Avant l’apprentissage de la marche, les lésions constatées sur ces zones sont suspectes et nécessitent d’être soigneusement investiguées.

Les brûlures les plus suspectes de maltraitance sont caractéristiques. Les brûlures par contact ont la forme de l’objet brûlant (cigarette, fer à repasser). Les lésions par ébouillantement des membres supérieurs et inférieurs sont généralement symétriques (en gants et en botte).

– Les lésions internes. Les lésions viscérales 15 et thoraciques 16 , une hémorragie rétinienne, un hématome sous-dural, une hémorragie intracérébrale 17 ainsi qu’une surdité (provoquée par une gifle ou des coups sur l’oreille) doivent toujours être soigneusement documentées.

– Les fractures 18 et les luxations. Les soignants doivent systématiquement s’interroger sur les causes de fractures et de torsions, d’élongations ou de broiements des articulations.

Les gémissements, les pleurs ou les cris lors de la mobilisation ainsi que l’immobilité silencieuse d’un nourrisson doivent faire suspecter une fracture ou une lésion interne.

– Les lésions du système nerveux central. Les maltraitances infantiles peuvent entraîner de graves lésions du système nerveux central (« traumatisme par secouement »), notamment chez l’enfant de moins d’un an.

– Des signes de dénutrition et de mauvaise hygiène sont généralement l’indice de négligence ou de carences graves. Un défaut majeur de la couverture vaccinale, l’incapacité de la mère à se rappeler si son bébé a reçu les vaccinations adéquates et l’absence d’un pédiatre de référence peuvent être des signes discrets de négligence. Ces indices doivent impérativement être interprétés en fonction du contexte. Ainsi, un enfant insuffisamment nourri ou non vacciné peut être choyé par sa famille dans un pays en voie de développement ou dans une famille d’immigrés clandestins. De même, des Témoins de Jéhovah peuvent refuser les vaccinations sans pour autant maltraiter leur enfant.

1.2. Les signes fortement suspects de violence sexuelle

Voici la liste des indicateurs évocateurs d’une violence à caractère sexuel :

– La présence de sperme sur le corps de l’enfant ou sur ses vêtements.

– Des lésions traumatiques récentes ou cicatrisées au niveau génital, périnéal (lorsque les lésions ne peuvent s’expliquer par une chute à califourchon 19 ) et anal (blessures, fissures suspectes, béance anale ou vaginale anormale, béance du méat urinaire, synéchies 20 , fusions labiales ou adhérences des petites lèvres 21 , etc.), une fistule recto-vaginale, vésico-vaginale ou recto-anale, des saignements vaginaux et rectaux ainsi que des douleurs pelviennes, génitales ou anales doivent impérativement faire suspecter une agression sexuelle. Soulignons cependant que l’intromission par l’enfant lui-même d’un objet (par exemple, un jouet) dans le vagin ou l’anus peut provoquer des lésions similaires à celles causées par une agression sexuelle.

– Les infections sexuellement transmissibles. Les maladies sexuellement transmissibles font toujours soupçonner une violence sexuelle. Des douleurs, une leucorrhée, des ulcérations, des démangeaisons ou une irritation peuvent signaler de telles infections et doivent attirer l’attention des intervenants. Notons cependant que certains germes peuvent être transmis de la mère à l’enfant in utero par voie transplacentaire (par exemple, la syphilis, le VIH), intra-partum (au moment de l’accouchement) par contact avec le sang et les sécrétions (par exemple, les condylomes à papillomavirus) ainsi que par exposition post-partum via l’allaitement au sein (par exemple, le VIH). La transmission parentérale (par transfusion sanguine, par contact avec du sang ou des dérivés sanguins) est également bien connue pour certaines maladies (par exemple, l’hépatite B). Une contamination accidentelle de tégument à tégument, par des sous-vêtements ou par des objets de toilette est aussi possible pour certaines infections (par exemple, les condylomes à papillomavirus).

Transmission sexuelle hautement probable. Un herpès simplex de type II au niveau périnéal au-delà de la période néonatale (3 mois), des Trichomonas vaginalis chez l’enfant de plus de 6 mois, une gonorrhée (Neisseria gonorrhoeae) chez un enfant de plus d’un an ou des Chlamydia trachomatis après l’âge de 3 ans (soit lorsqu’une transmission materno-fœtale n’est plus plausible) donnent une quasi certitude d’abus sexuel. Il en est de même d’une syphilis ou d’un VIH lorsque la mère est séronégative pour ces infections.

Transmission sexuelle possible. Une infection à Neisseria gonorrhoeae chez l’enfant de moins d’un an ou à Chlamydia chez l’enfant de moins de 3 ans peut avoir été transmise lors d’un rapport abusif mais une transmission de la mère à l’enfant est possible. La transmission de Gardnerella vaginalis et de mycoplasmes génitaux (Ureaplasma urealyticum, Ureaplasma urealyticum, Mycoplasma hominis) peut être sexuelle mais ce n’est pas systématique (transmission périnatale possible). La transmission sexuelle de condylomes à papillomavirus est possible mais d’autres modes de contamination peuvent être évoqués (transmission materno-foetale ou accidentelle par contact avec des vêtements ou des objets contaminés). Par contre, la possibilité d’un abus doit être sérieusement envisagée face à des condylomes acuminés dans les régions génitales ou anales. Bien que l’hépatite B ait d’autres modes de transmission que la voie sexuelle 22 , cette infection doit faire envisager la probabilité d’une violence sexuelle si la transmission verticale (de la mère à l’enfant) a été éliminée. Les vulvites mycosiques, même à répétition, sont banales chez la petite fille. Néanmoins, des inflammations récurrentes doivent attirer l’attention et faire envisager la possibilité d’une origine infectieuse 23 (recherche systématique de tous les germes possibles).

Transmission non sexuelle. Certaines affections ne sont pas transmises par contact sexuel. C’est le cas des streptocoques du groupe A, du Candida albicans, de la Shigella, des salmonelles, du Streptococcus pneumoniae, de l’haemophilus influenzae, du staphylocoque doré, de la Moraxella catarrhalis et de la Yersinia enterolytica.

– Les contusions, les déchirures et les cicatrises hyménales sont suspectes. Une cause traumatique est d’autant plus probable que les lésions sont importantes (allant jusqu’au vestibule). A contrario, l’absence de déchirure de l’hymen n’exclut pas une agression sexuelle. En effet, d’une part, il peut y avoir pénétration vaginale sans déchirure de l’hymen ; d’autre part, il peut y avoir violence sexuelle sans pénétration vaginale, les abus perpétrés contre les enfants consistant aussi en attouchements, simulations d’acte sexuel, pénétrations anales ou buccales.

1.3. Les signes discrets de violence sexuelle

Souvent les signes physiques d’une agression sexuelle ne sont pas aussi nets, aussi graves ou aussi caractéristiques que ceux décrits ci-dessus. 24 , des dommages corporels ne sont pas systématiquement détectés 25 .

Certains signes incitent néanmoins à envisager l’éventualité d’un abus sexuel en raison du contexte dans lequel ils surviennent. C’est le cas des manifestations somatiques. Certaines sont liées à l’agression tels que les troubles fonctionnels gastro-intestinaux (douleurs abdominales, vomissements, constipation, diarrhée, anisme 26 ) et urinaires 27 , les algies pelviennes, les maux de gorge ou la gêne à la déglutition ; d’autres sont non spécifiques comme la fatigue, les douleurs diffuses, les céphalées, les poussées de température, etc.

Une grossesse chez une adolescente doit faire envisager la possibilité d’un abus, surtout si elle est mal acceptée, déniée 28 , déclarée tardivement et que le père est absent ou que son identité reste volontairement secrète. La question d’un inceste doit se poser quand une jeune parturiente adresse une demande d’avortement en présence d’un membre masculin de sa famille. Une demande de test HIV, d’un test de grossesse ou de contraception pour une jeune fille pubère doit être interrogée surtout si elle émane des parents ou d’un tiers adulte.

Les intervenants doivent repérer les divers signes d’appel, les interpréter en fonction les uns des autres et tenir compte de leur accumulation. Plus ils sont nombreux, plus le diagnostic de violence sexuelle est probable et plus les abus sont potentiellement graves et chroniques.

2. Les indices psychosociaux

2.1. Les signes fortement suspects d’une maltraitance (non spécifiquement sexuelle)

Quel que soit son âge, un changement récent et massif du comportement de l’enfant doit inciter d’emblée à envisager l’éventualité d’un traumatisme (non spécifiquement sexuel). L’apparition subite de peurs incontrôlables, de pleurs, d’une tristesse, d’une énurésie, d’une encoprésie, de troubles de l’appétit (anorexie, boulimie), de troubles du sommeil (terreurs nocturnes, insomnies, cauchemars, difficultés d’endormissement, refus d’aller se coucher) ainsi que le désinvestissement d’activités significatives (conduites ludiques, scolarité) sont des signes d’alerte.

Ces changements peuvent notamment survenir après une garde par une nourrice, un baby-sitter ou un parent, au retour de l’enfant à domicile après un camp de vacances, etc.

– Le nourrisson. La souffrance de l’enfant en bas âge (avant 3 ans) se caractérise par un trouble du fonctionnement global : augmentation des cris ou des pleurs, troubles de l’alimentation (anorexie, polyphagie, mérycisme), troubles du sommeil, hyperactivité ou apathie (gestes rares, ralentis, parfois associés à des balancements), « vigilance gelée » 29 , ralentissement de l’évolution du développement psychomoteur et retard staturo-pondéral 30 .

– L’enfant d’âge scolaire. Les jeunes victimes peuvent manifester un retard de développement, voire régresser à un stade antérieur : position fœtale, dépendance affective aux parents avec difficulté de s’autonomiser, recherche de protection, peur de l’étranger, énurésie, encoprésie et perturbations scolaires (refus de fréquenter l’école, ralentissement du fonctionnement intellectuel, diminution des performances, etc.). D’autres, au contraire, manifestent des capacités de développement accrues (langage, habilités sociales, hauts niveaux de performances scolaires, etc.). On parle alors de « progression traumatique » ou de « prématuration traumatique ». Ils peuvent aussi présenter des problèmes de comportement : cachotteries, fugues, agressivité, hyperactivité, repli sur soi, conduites d’évitement (évitement des situations rappelant le traumatisme initial).

– Les adolescents. A l’adolescence, les indices les plus évocateurs d’une souffrance sont les comportements asociaux et délinquants, les actes d’autodestruction (scarifications, automutilations, idées ou conduites suicidaires), les addictions (alcoolisme, toxicomanie), les fugues répétées, les troubles de l’humeur (dépression) et les conduites d’évitement.

2.2. Les signes fortement suspects d’une agression sexuelle

Outre les troubles psychotraumatiques sus-cités, les jeunes victimes peuvent manifester des réponses émotionnelles et comportementales plus spécifiques des violences sexuelles.

– Le rapport à la sexualité. Les troubles de la conduite sexuelle et les comportements sexuels précoces doivent dans tous les cas faire suspecter des abus sexuels. Notons cependant qu’à eux seuls, ils ne constituent pas une preuve irréfutable d’agression sexuelle. A contrario, toutes les victimes ne présentent pas ce type de trouble.

Les conduites de répétition 31 . Les enfants sexuellement agressés mettent en scène des aspects ou des thèmes de l’agression sexuelle de manière répétée dans leurs dessins, leurs jeux ou leurs fantaisies (par exemple, jeu « papa et maman » ou jeu « du docteur » particulièrement réalistes ou violents, simulation de rapports sexuels avec des jouets accompagnés de gestes, de bruitages, etc.).

Les enfants peuvent témoigner de connaissances sexuelles inadaptées à leur âge ou à leur degré de développement (dessins suggestifs, mots crus, gestes sexualisés, jeux sexuels précoces, etc.), manifester des préoccupations sexuelles excessives pour leur âge (curiosité soudaine portée aux parties génitales des êtres humains ou des animaux, questionnement récurrent sur la sexualité, voyeurisme, allusions répétées et inadéquates à la sexualité), se livrer à des 32 prématurées, parfois compulsives (attouchements des parties génitales, masturbation excessive, y compris en public, introduction d’objets dans le vagin ou l’anus) ou adopter des 33 et exhibitionnistes. Certains présentent un comportement séducteur et sexualisé, érotisant leurs rapport à autrui, attribuant une connotation sexuelle injustifiée aux attitudes des adultes, voire harcelant ou agressant sexuellement des adultes ou d’autres enfants. A contrario, d’autres enfants manifestent un rejet de tout ce qui touche à la sexualité.

Dans tous les cas, ces comportements doivent interpeller les adultes. On se rappellera néanmoins qu’ils ne sont pas une preuve formelle de maltraitance sexuelle. En effet, les enfants manifestent généralement une grande curiosité sexuelle. A l’adolescence, les bouleversements hormonaux et pulsionnels stimulent également cet intérêt. La masturbation, même intensive, est banale avant l’âge de 3 ans. De plus, l’enfant peut reproduire des scènes qu’il a surprises (par exemple, adultes se livrant à des rapports sexuels en réalité ou à la télévision).

– Le rapport au corps et à l’hygiène. Certains enfants expriment leur peur que leurs parties génitales soient endommagées, déclarent que leur corps est sale ou se livrent à des rituels de lavages obsessionnels. D’autres au contraire refusent d’être changés, craignent la toilette des organes génitaux ou négligent soudainement leur hygiène. Les adolescentes peuvent devenir obèses ou cachectiques suite à des troubles du comportement alimentaire, l’obésité ou la maigreur leur tenant lieu de protection contre la séduction.

– Le rapport à la nudité. Un refus brutal de se déshabiller pour aller se coucher (parfois doublé d’une tendance à se barricader la nuit) ou de se dévêtir en public dans des lieux ad hoc (piscine, plage, vestiaire sportif, etc.) et la manifestation soudaine d’une gêne inhabituelle devant un adulte sont également en faveur d’un abus de nature sexuelle. A contrario, d’autres enfants, parce qu’ils ont appris à construire leurs relations sur base sexuelle, adoptent un comportement provoquant et se dévêtent sans gêne dans des situations inconvenantes.

– Le rapport aux autres. On doit se poser la question d’une maltraitance lorsque l’enfant refuse soudainement, sans raison apparente ni compréhensible, de côtoyer ou de rester seul en présence d’une personne jusqu’alors appréciée ou tolérée ou lorsqu’il déclare abruptement qu’il la déteste. Une conduite d’évitement ou une peur subite des adultes du sexe opposé ou du même sexe (type de peur déterminée par le sexe de l’abuseur) doit également inciter à envisager un vécu de violence. La volonté déclarée d’un adolescent de ne pas se marier ou de ne pas avoir d’enfants, pour banale qu’elle puisse être, doit être interrogée lorsque elle est couplée à d’autres signes préoccupants.

3. Les facteurs renforçant la suspicion de maltraitance

La suspicion de violence peut être renforcée par différents facteurs.

– Les lésions et infections. La suspicion est renforcée lorsque :

. L’enfant présente des plaies, des blessures ou des infections génito-urinaires de manière récurrente.

. Il présente des lésions d’ancienneté diverses.

. Il présente des complications pour des lésions qui auraient pu être soignées antérieurement, voire doit être hospitalisé précipitamment.

– L’attitude des parents vis-à-vis des intervenants peut également donner des indices. C’est le cas lorsque les parents :

. n’ont pas fait état des lésions ou des douleurs, celles-ci ayant été signalées par un tiers (par exemple, un enseignant, un éducateur, etc.) ou par l’enfant lui-même.

. n’ont pas mentionné de lésions traumatiques, celles-ci étant découvertes inopinément lors d’un examen clinique banal ou à l’occasion d’une plainte sans rapport avec elles.

. refusent de révéler la cause du traumatisme physique ou des infections.

. donnent des explications vagues, confuses, embrouillées et changeantes quant à la cause des symptômes de l’enfant.

. fournissent des explications qui ne peuvent objectivement correspondre à la cause des symptômes (par exemple, gymnastique, équitation, chute, contamination par les toilettes, etc.).

. prétendent que l’enfant a été blessé accidentellement par un frère ou une sœur alors que cela semble peu probable (par exemple, brûlures de cigarette, fracture, etc.).

. dénigrent l’enfant ou l’accusent d’avoir un comportement anormal.

. prennent l’intervenant à témoin pour justifier une punition.

. consultent tardivement malgré la gravité évidente des lésions de leur enfant.

. minimisent ou dénient les symptômes de l’enfant.

. refusent les investigations médicales, l’hospitalisation ou les traitements.

. fuient à l’évocation de la possibilité d’un abus.

. manifestent une attitude défensive, voire agressive vis-à-vis des intervenants.

. évitent que l’enfant soit seul avec l’intervenant.

– Le comportement de l’adulte vis-à-vis de l’enfant qu’il accompagne. Parfois, c’est le comportement d’un adulte vis-à-vis de l’enfant qui fait soupçonner un abus sexuel. Une intimité malsaine entre adulte et enfant ou l’indifférence d’un adulte responsable (absence de regard, de geste, de parole entre l’enfant et le parent) doivent attirer l’attention. Notons cependant que les pères sont parfois très présents auprès leurs filles lorsqu’elles deviennent adolescentes. En effet, ils peuvent redouter que les fréquentations masculines de leur progéniture ne se révèlent dangereuses.

– Le comportement de l’enfant vis-à-vis des intervenants. Les comportements suivants doivent inquiéter les intervenants :

. L’enfant esquisse des mouvements de protection à l’approche de l’examinateur.

. Il manifeste une gêne excessive ou refuse de se déshabiller pour l’examen médical.

. Il refuse vigoureusement d’être touché (il se débat, hurle, etc.) ou d’être examiné.

. Il refuse de parler de ses relations avec ses proches

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Lire aussi

Les signes faisant suspecter une agression sexuelle
Les violences sexuelles faites aux enfants sont souvent ignorées
Les symptômes physiques fortement suspects d’une agression sexuelle chez l’enfant
Les signes physiques discrets de violences sexuelles faites aux enfants
Déceler les violences sexuelles faites aux enfants au travers de leur comportement

Déceler les comportements évocateurs de violences sexuelles chez l’enfant

Documents joints

Notes et références

  1. Pour de plus amples informations sur les violences sexuelles faites aux enfants, nous convions le lecteur à consulter les articles du même auteur : « Les violences sexospécifiques à l’égard des enfants » et « Causes et facteurs de risque des violences sexospécifiques et sexuelles exercées contre les enfants » disponibles sur le site http://www.resilience-psy.com. Des articles sur les violences faites aux femmes et aux hommes sont également disponibles sur ce même site (voir la bibliographie de l’auteur en fin d’article).
  2. J’emprunte ce terme à Wallerstein L., Lewis J., Blakeslee S. Ces auteurs nomment ainsi les effets retardés du divorce sur les enfants (« The Unexpected Legacy of Divorce : The 25 Year Landmark Study », New York, Hyperion Books, 2000).
  3. « Recommandations du Jury », in « Comment reconnaître une maltraitance ancienne chez l’adulte et la personne âgée », http://psydoc-fr.broca.inserm.fr/conf&rm/conf/confvictime/prvictimes.html%5B/efn_note%5D. Toutefois, cette croissance peut résulter d’un renforcement des déclarations de cas liée à l’évolution des mentalités et non d’une majoration du phénomène lui-même.

    Dans la majorité des cas (60 à 90% des cas selon les pays), la jeune victime connaît son agresseur (membre de sa famille ou personne jouissant de sa confiance tels qu’amis de la famille, voisins, connaissance, éducateurs, enseignants, religieux, etc.). Plus elle est jeune, plus la probabilité est élevée que l’auteur soit un membre de sa famille ou un proche (baby-sitter, nourrice, par exemple).

    2. Le dévoilement des violences sexuelles

    Les violences sexuelles sont rarement dévoilées au moment de leur occurrence. Généralement, la victime ne révèle les faits que plusieurs mois, voire plusieurs années plus tard. Souvent même, le silence n’est brisé qu’à l’adolescence ou à l’âge adulte.

    Les révélations claires et spontanées de maltraitance sexuelle sont rares avant l’âge de 4 ans 3Les enfants plus jeunes verbalisent difficilement les faits et leur vécu mais peuvent signaler des douleurs ou des démangeaisons, par exemple au niveau génital ou anal.

  4. Nous écartons ici les mensonges proférés par l’enfant à la demande d’un de ses parents comme cela se produit parfois dans le cadre d’une séparation conjugale difficile. A contrario, notons que l’absence d’un parent du domicile familial consécutive à un divorce peut favoriser les allégations véridiques en offrant à l’enfant de nouvelles opportunités (par exemple, de dénoncer un inceste lorsque le père a quitté le foyer).
  5. Nous entendons par intervenant, toute personne gravitant autour de l’enfant aussi bien au niveau personnel (parents, famille élargie, amis, voisins, etc.) que professionnel (personnel médical et paramédical, corps enseignant, éducateurs, etc.).
  6. plus de détails, voir l’article du même auteur : « Les violences sexospécifiques à l’égard des enfants », http://www.resilience-psy.com.[/efn_note%5D .

    – La religion. Plus l’interdit religieux concernant la sexualité en dehors des liens du mariage est impératif, plus la victime éprouvera de difficulté à dénoncer les faits.

    – Un contexte de violence généralisée. Dans les contextes de violence généralisée (guerre, conflit armé), une agression sexuelle exercée contre un enfant peut n’être pour sa famille qu’une des violences vécues parmi d’autres tels que l’assassinat ou la disparition d’un de ses membres, la perte des biens, l’exode, etc.

    2. Facteurs propres à l’enfant victime

    – La maturité des victimes. Plus les enfants sont jeunes et plus il leur est difficile de traduire leur vécu en mots. En grandissant, ils développent leurs capacités à communiquer, à résoudre les problèmes, à prendre des responsabilités, etc. Cependant, certains enfants, parce qu’ils évoluent dans un environnement familial et social précaire ou violent, voient leur développement freiné ou interrompu 7C’est le cas notamment de nombreuses petites filles dans les pays en voie de développement. En matière de scolarité, les parents pauvres privilégient généralement leurs fils au détriment de leurs filles car ils sont redevables traditionnellement de les soutenir durant leur vieillesse.

  7. Cités par Dantchev N. in « Comment reconnaître une maltraitance ancienne chez l’adulte et la personne âgée », http://psydoc-fr.broca.inserm.fr/conf&rm/conf/confvictime/prvictimes.html%5B/efn_note%5D, ont constaté que dans un groupe d’étudiantes américaines ayant indiqué avoir été victimes d’actes correspondant à la définition de viol communément admise aux Etats-Unis, 25% seulement ont déclaré avoir été « violées ».

    Ajoutons encore qu’il est rare que les enfants communiquent spontanément, en particulier avec des personnes inconnues. En outre, leur désastreuse expérience a appris aux jeunes victimes à se méfier des adultes.

    – L’intimidation psychologique de la part de l’agresseur et la crainte des représailles éprouvées par les victimes. Les enfants sont sensibles aux brimades, aux humiliations (dévalorisations, injures, etc.), aux sarcasmes, au mépris, au rejet, à l’isolement (par exemple, lorsqu’on l’ignore ou qu’on le prive de contacts, etc.), à l’exclusion (par exemple, lorsqu’on l’exclut d’événements signifiants), aux privations de toutes sortes (nourriture, loisirs, etc.), aux menaces (par exemple, menace de représailles), au chantage (par exemple, chantage au suicide de l’agresseur en cas de dénonciation), etc. Paralysés par un phénomène d’emprise, ils subissent leur sort en silence.

    – Les sentiments de honte et de culpabilité. Les sentiments de honte, de souillure, de culpabilité et de déshonneur censurent les velléités à révéler les agressions subies. Les enfants peuvent concevoir de l’humiliation de s’être livrés à des pratiques condamnables. Ils se sentent d’autant plus fautifs qu’ils sont persuadés d’avoir joué un rôle actif dans l’avènement ou le déroulement des faits. Ces sentiments sont renforcés lorsque l’agresseur abonde dans ce sens, déclarant qu’il n’a fait que céder au comportement provoquant et séducteur de l’enfant 9Soulignons que la responsabilité de l’activité sexuelle avec l’enfant doit toujours être attribuée l’adulte, peu importe qui a initié la rencontre (les jeunes adolescents séduisent parfois activement des jeunes gens, voire même des adultes) et qui en retire satisfaction. En effet, c’est à lui, et non à l’enfant, de discriminer ce qui constitue une transgression aux normes sociales ou morales et de poser les interdits.

  8. On se rappellera, par exemple, l’émoi suscité en Belgique par l’affaire Dutroux.
  9. Dans de nombreuses cultures, la virginité et la chasteté des filles reflètent l’honneur de la famille. Dès lors, les agressions sexuelles sont perçues comme une honte et les victimes sont déshonorées. Les jeunes filles courent le risque d’être chassées du domicile familial, elles sont souvent contraintes d’épouser leur agresseur ou sont indignes de prétendre au mariage. Certaines sont même assassinées par un membre de leur famille pour laver la honte et recouvrer l’honneur familial.
  10. Près de 90% des enfants maltraités présentent des traces de blessures sur la peau.
  11. La mastoïde est l’éminence de l’os temporal située en arrière du conduit auditif externe et recouverte par le pavillon de l’oreille.
  12. Le plus souvent intra-abdominales (lésions du foie, de la rate, du mésentère, du rein ou du rectum), elles peuvent évoluer à bas bruit et se révéler brutalement au bout de plusieurs jours par un état de choc ou une symptomatologie abdominale aiguë.
  13. Les hémothorax et les pneumothorax sont en général consécutifs à des fractures des côtes.
  14. Les signes d’appel sont l’altération de la conscience, les crises convulsives, un déficit moteur, les troubles du tonus, les vomissements, la cyanose, la pâleur et les apnées d’apparition brutale.
  15. Les fractures sont fréquentes (entre 10 et 55% des enfants maltraités), surtout chez les enfants de moins de trois ans.
  16. Les chutes à califourchon ne provoquent qu’exceptionnellement des lésions hyménales sauf lorsqu’il y a empalement.
  17. Adhérence cicatricielle de deux surfaces ulcérées.
  18. Soulignons cependant que ces adhérences ne sont pas un indice suffisant d’abus.
  19. La transmission parentérale (par contact avec du sang ou des dérivés sanguins) est bien connue. La contamination par la salive, par contact avec des lésions cutanées et par l’échange d’objets personnels tels que brosse à dents ou linge de toilette est aussi évoquée. La voie sexuelle est le mode de transmission le plus fréquent dans les régions à faible endémicité comme l’Europe. La transmission horizontale est courante en Afrique et elle est, tous pays confondus, plus fréquente chez les jeunes enfants et les adolescents que chez les adultes.
  20. Soulignons que les vulvites infectieuses sont plus rares que les vulvites mycosiques.
  21. Même lorsque l’on procède à l’examen médical immédiatement après le viol Ce qui, nous l’avons vu, est rarement le cas. Un examen médical pour violence sexuelle est pratiqué dans la semaine suivant l’agression dans moins de 10% des cas.
  22. Dans la grande majorité des cas, les abus sexuels sont commis par des proches sans recours à la violence physique.
  23. On appelle anisme, la contraction paradoxale du sphincter anal externe au cours d’un effort de défécation.
  24. Pour plus de détails, voir Watier A., “Répercussions à long terme des abus sexuels sur la sphère pelvi-périnéale, Sherbrooke, http://www.perineales.org/conf-abus-sex.pdf et Labat J.-J., « Abus sexuels et pathologie fonctionnelle pelvipérinéale », ConStat, 1996, 3, 10 – 13, http://www.urofrance.org/lienbiblio.php?ref=CT-1996-00030010&type=PDF&lang=fra
  25. « Le déni de grossesse » est fréquent chez les très jeunes adolescentes enceintes suite à un viol et chez les jeunes filles enceintes suite à un abus sexuel incestueux.
  26. Vigilance gelée est la traduction de la locution anglophone « frozen watchfulness ». L’enfant est capable prématurément de contrôler sa motricité, de rester immobile de longs moments, de suspendre son activité, d’interrompre ses babillages, ses rires ou ses pleurs en fonction de l’état émotionnel de son entourage.
  27. Pouvant mener dans de rares cas au « nanisme psychosocial », encore appelé « nanisme de frustration », « nanisme de détresse » ou « nanisme par carence psychoaffective ». Le retard staturo-pondéral est la conséquence des difficultés relationnelles entre l’enfant et son entourage.
  28. Il s’agit de conduites complexes réitérant des comportements effectués pendant l’agression. Elles sont une des modalités du syndrome de répétition. Le syndrome de répétition est un ensemble de manifestations cliniques qui se répètent à intervalles variables et par lesquelles le sujet a l’impression de revivre la scène ou les scènes traumatisantes initiales.
  29. conduites auto-érotiques
  30. conduites sexuellement provocantes

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