Les enfants des rues – L’enfer du décor

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Evelyne Josse, 2006

Préliminaire

Auparavant, la rue était un espace déterminant pour les interactions sociales. Elle était un lieu de vie et d’échange à part entière (c’est encore le cas pour certaines villes africaines).

Peu à peu, cet espace s’est modifié. De lieu de vie, la rue est devenue lieu de passage et de transit.

Pour de nombreuses personnes, dans de nombreux pays, la rue est désormais synonyme d’insécurité. Le temps passé en rue est abrégé, les rencontres y sont présumées suspectes, on n’y entre plus en relation.

Cette dynamique se renforce en permanence. On construit des centres commerciaux accessibles uniquement à une certaine frange de la population et surveillés par des vigiles. On construit des quartiers privés bien sécurisés, des maisons protégées par des grilles, de hauts murs ou des clôtures de barbelés.

Toutes ces mesures répondent à une demande de la population et reflètent la vision que les sociétés ont aujourd’hui de la rue : un espace dangereux.
La perception que les gens ont des enfants des rues ne peut être différente de celle qu’ils ont de la rue. La présence de ces enfants dans un espace public auquel ils donnent une fonction différente de celle que la majorité lui confère en fait une menace. Ils incarnent le danger auquel on peut donner un visage.

Introduction : Le développement de l’enfant

Les enfants connaissant un développement satisfaisant sont capables :

  • d’être en relation avec d’autres personnes, adultes et enfants.
  • de prendre plaisir à donner de l’affection à autrui.
  • de comprendre les règles sociales et la différence entre « le bien » et « le mal ».
  • de raisonner, de créer, d’imaginer, de planifier et d’expérimenter.
  • d’avoir un sentiment de valeur personnelle (au sein de leur famille, de leur communauté, etc.).
  • de prendre soin d’eux-mêmes (par exemple, se laver).

1. Les besoins de base

Les besoins de base sont :
Les besoins physiques : l’eau, la nourriture, le logement, les vêtements, les soins de santé.

La famille. L’enfant a besoin d’un environnement familial sain pour :

  • développer sa confiance en lui et acquérir un sentiment de sécurité.
  • apprendre les règles et les usages de sa culture et de sa communauté.

Le développement social s’acquiert par le jeu, l’éducation et la communication avec les membres de l’entourage.

Les nouvelles expériences. L’enfant développe ses connaissances et ses capacités en faisant de nouvelles expériences (expériences physiques, jeux, communication, etc.).

La responsabilité. En grandissant, l’enfant acquiert progressivement des responsabilités, tant dans sa famille qu’à l’extérieur. De cette façon :

  • Il développe sa confiance en lui et le sentiment d’être utile au sein de sa communauté.
  • Il apprend à prendre des initiatives.
  • Il renforce sa connaissance des valeurs morales.

La reconnaissance. L’être humain est un être éminemment social. Son développement se fait dans un environnement social (familial, scolaire, etc.).

Si cet environnement accepte l’enfant tel qu’il est malgré ses défauts et qu’il reconnaît ses compétences, ce dernier va développer un sentiment de valeur personnelle et un sentiment de confiance en soi.

2. Le développement de l’enfant

2.1. L’enfant préscolaire

Le jeune enfant est très dépendant de sa famille. Il souffre grandement lorsqu’il est séparé de ses proches et qu’il ne trouve pas une famille de substitution pour prendre soin de lui.

Il a besoin d’adultes qui lui prêtent attention, l’encouragent à jouer, à parler et à tenter des expériences.

2.2. L’enfant scolaire

A cet âge, l’enfant devient plus indépendant. Il est déjà en mesure d’aider sa famille.

Il est davantage conscient des règles sociales, des notions de « bien » et de « mal », des conflits sociaux et particulièrement, des conflits familiaux.

Il peut prendre plus de responsabilités, prendre des décisions le concernant ou participer à de prises de décision le concernant.

2.3. L’adolescence

L’adolescence débute avec la puberté.

Les changements survenant à l’adolescence sont d’ordre physique (transformation du corps, possibilité de procréation) et psychosocial (affirmation de l’identité, découverte de la sexualité).

Filles et garçons sont confrontés à de nombreux changements physiques qu’ils ne comprennent pas toujours très bien.

Ils commencent à avoir des amis ou des relations amoureuses ou conjugales avec les personnes de l’autre sexe (les modalités varient en fonction des cultures).

Ils aiment être traités avec considération par les adultes.

Ils s’investissent de plus en plus dans les décisions les concernant.

Ils n’acceptent plus docilement les opinions de leurs aînés, en particulier s’ils vivent dans les grandes villes et loin du lieu d’origine de leur famille (c’est-à-dire éloignés du clan familial et de son système éducatif). Ceci augmente le risque de conflit avec les membres de la famille dont ils partagent le quotidien.

Qui sont les enfants des rues ?

1. Pourquoi les enfants se retrouvent-ils dans la rue ?

L’intrication des facteurs politiques, économiques, sociaux et psychologiques qui conduisent l’enfant à vivre en rue est trop complexe pour donner une explication simple de ce phénomène mondial en progression.

La pauvreté dans les pays en voie de développement est la cause la plus souvent citée. De nombreux enfants issus de familles défavorisées sont forcés d’abandonner leur scolarité et de gagner la rue pour y travailler.
Un exemple : Les politiques d’urbanisation dans les grandes villes luttant contre les chancres de la pauvreté.
En 2004, des quartiers pauvres du centre ville de Ouagadougou, capitale de Burkina Faso, ont été démolis suite à une politique d’urbanisation. Les familles ont été refoulées en périphérie (certaines n’ont pas été relogées).
Leurs enfants habitués à la ville ont quitté leur famille et sont venus s’installer dans les rues du centre.
Certaines familles vivaient de petits commerces dans ces quartiers défavorisés, commerces qu’elles ne peuvent espérer remonter en dehors de la ville. Cette politique d’urbanisation paupérise encore davantage des familles entières qui reviennent au centre-ville et se retrouvent en rue.

– Cependant, derrière la pauvreté, on constate qu’un des facteurs majeurs menant les enfants à la rue est l’effondrement de la famille traditionnelle, des valeurs et des structures communautaires. L’urbanisation rapide et les conflits armés (et leur cortège de conséquences : mutations socio-économiques, culturelles et politiques) sont à l’origine de ces changements négatifs. Les signes de cet effondrement sont :

  • La dislocation des valeurs qui autorise l’exploitation et l’abus des enfants.
  • La rupture des familles et le manque de support de la famille traditionnelle élargie.
  • Le manque d’accès à des services communautaires.
  • La violence domestique et communautaire.

Les enfants des rues ont souvent un lourd passé fait de rupture et de violence.

Les problèmes familiaux : disputes et violence intrafamiliale accrues en cas d’alcoolisme ou de maladie mentale des parents (enfants négligés, humiliés, battus, abusés sexuellement, etc.), enfants rejetés par la famille (familles pauvres, enfants soupçonnés d’être des sorciers, anciens enfants soldats, handicapés physiques ou mentaux, homosexuels, toxicomanes, filles violées et/ou enceintes en dehors du mariage, enfants « difficiles », etc.), enfants « asservis » au sein de la famille (surchargés par la quantité des travaux qui leur sont assignés), etc.


Un exemple : Les enfants sorciers du Congo

Lorsque de nombreux malheurs s’abattent sur une famille, un de ses enfants peut en être tenu pour responsable. Cet enfant, dit sorcier, est généralement rejeté par sa famille. Il peut aussi faire l’objet de rituel traditionnel dont le but est sa rédemption. Ceux-ci sont souvent très violents (l’enfant est battu pour faire sortir le mal qu’il a en lui).


La crise économique : chômage, pauvreté et indigence (les enfants travaillent pour subvenir à leurs propres besoins et/ou pour entretenir leur famille, migration de la campagne vers la ville, etc.), familles nombreuses (les enfants partent pour laisser la place aux frères et sœurs plus jeunes), familles séparées (enfants orphelins suite au décès d’un ou des deux parent(s) par maladie telle le SIDA, parents hospitalisés ou emprisonnés, etc.), etc.

Le manque d’alternatives à la rue : manque d’institutions pour enfants offrant des services adéquats (manque de personnel, de matériel, restriction de la liberté empêchant les enfants de travailler en rue pendant la journée ; les enfants s’échappent des institutions vécues comme des prisons), absence d’autres solutions d’accueil (par exemple, familles d’accueil, asiles de nuit, etc.), manque de soutien social ou psychologique aux familles en difficulté, manque d’initiative pour réinsérer les enfants en familles (tracing pour retrouver les familles, soutien psychologique et social pour permettre et maintenir la réinsertion en famille, etc.), etc.


Un exemple : Le Burkina Faso

Actuellement, il n’existe pas de réelle alternative à la rue si ce n’est le retour en famille. Or, si les enfants ont quitté leur famille, c’est parce que les conditions de vie y étaient difficiles (violence, pauvreté extrême ne permettant pas aux parents de nourrir leurs enfants en suffisance). Même si certains renouements familiaux réussissent, il est normal que d’autres échouent, ramenant les enfants en rue.

Il existe plusieurs centres résidentiels accueillant les enfants qui désirent quitter la rue. Cependant, dans la plupart d’entre eux, les enfants y sont maltraités, les éducateurs reproduisant les comportements violents des parents. Aux mêmes causes, les mêmes effets : la plupart des enfants quittent les centres et reviennent en rue.


La guerre et ses conséquences : enfants soldats démobilisés (parfois incorporés par enlèvement, forcés à tuer, à violer, etc. ; ils ont été punis, humiliés et ont subi des privations pour briser leur résistance), enfants réfugiés et déplacés orphelins ou séparés de leurs parents durant l’exode, au cours d’un conflit armé, etc.


Un exemple : Le retour des réfugiés dans leur pays d’origine

Entre 2003 et 2004, le nombre d’enfants dans les rues de Ouagadougou, capitale du Burkina Faso, a doublé. Suite au conflit armé en Côte d’Ivoire, des familles burkinabés qui y vivaient réfugiées sont revenues dans leur pays. La plupart d’entre elles se sont installées dans la campagne. Leurs enfants ne parvenant pas à s’adapter à ce mode de vie rural ont fuit et ont abouti dans la grande ville de Ouagadougou.

Un exemple : Les enfants soldats du Libéria

Les guerres successives du Libéria ont eu pour effet l’enrôlement de nombreux enfants (généralement des orphelins rejoignant l’armée pour assurer leurs besoins de base), les forçant à piller, à violer, à tuer et à transgresser divers tabous (les rites anthropophages étaient courants, les belligérants mangeant le cœur de leurs ennemis tués). Au sortir de la guerre, ces enfants qui ont grandi dans la violence et le crime sont rejetés par leur communauté qui les craint.


Les catastrophes naturelles et leurs conséquences : enfants rescapés d’une catastrophe naturelle où la famille a péri et/ou dont le logement a été détruit, etc.

Des causes spécifiques à certains pays ou contextes.


Un exemple : Les maîtres coraniques au Burkina Faso

Certains parents, fervents musulmans, confient un de leurs enfants à un maître coranique, chargé de l’éducation religieuse de celui-ci. Le maître exige des enfants qu’ils mendient afin de récolter l’argent nécessaire pour subvenir à leurs besoins. Lorsque les sommes ramenées sont insuffisantes, les enfants sont humiliés, voire maltraités. Petit à petit, par le biais de cette pratique, les enfants sont initiés à la rue. Lorsque les brutalités deviennent excessives, les enfants fuient l’école coranique et gagnent définitivement la rue.


Le contexte de la rue soumet les enfants à des expériences de déprivations, de mauvais traitements et de violence.

Les activités auxquelles ils se livrent (abus de drogues, prostitution, activités illégales et criminelles, etc.) favorisent les risques de mauvais traitements (exploitation, représailles, viols, répression policière, etc.).

Ils sont souvent rejetés, discriminés et stigmatisés par la communauté dans laquelle ils vivent.

2. Les enfants dans la rue ? Les enfants des rues ?

On peut distinguer les enfants dans la rue et les enfants de la rue.

2.1. Les enfants dans la rue

Ces enfants passent un temps important de la journée dans la rue en dehors de la responsabilité d’un parent ou d’un autre adulte. Ils ont encore le sentiment d’appartenir à une entité familiale car ils gardent des liens plus ou moins étroits avec leur famille. Certains poursuivent une scolarité sporadique.
S’ils sont dans la rue, c’est parce qu’ils fuient les tensions familiales, voire les mauvais traitements, ou pour pratiquer de petits boulots apportant un revenu complémentaire pour la famille.

2.2. Les enfants des rues

Ils considèrent la rue comme leur foyer et leurs copains comme leur famille. Les contacts avec la famille biologique sont quasi inexistants. Pour certains, le mot « famille » n’a plus aucun sens ce qui rend impossible la réintégration en famille ou l’adoption.

Ils n’ont plus de repères spatio-temporels. Manger, jouer, dormir et apprendre se pratique n’importe où et n’importe quand.

Les repères moraux ont disparu et ils en viennent à adopter des comportements violents, criminels et parfois même autodestructeurs.

2.3. Les familles des rues

Certains enfants vivent en rue avec leur famille.

Les « familles des rues » sont des familles déplacées suite à une catastrophe naturelle ou un conflit armé ou ayant migré d’une région vers une autre (généralement de la campagne vers la ville) pour des raisons économiques (dans l’espoir de trouver du travail).

Souvent, les enfants travaillent en rue avec les autres membres de leur famille.

2.4. Devenir un enfant des rues

En dehors des enfants orphelins ou abandonnés qui deviennent « enfants des rues » du jour au lendemain, les autres en général le deviennent graduellement. Cette évolution peut-être divisée en 4 étapes :
La rencontre avec la rue : l’enfant s’éloigne progressivement de son foyer et se rapproche de la rue. Il explore l’espace reliant son lieu de résidence à un centre urbain.
La rue ludique : l’enfant garde des liens avec sa famille mais la rue l’attire comme un espace de vie offrant des avantages.
La rue alternante : l’enfant vit en rue et revendique son statut d’enfant des rues.
La rue refusée : l’enfant fait le constat que la rue ne lui offre pas un futur satisfaisant.

Ces étapes constituent un continuum. Toutefois, certains enfants ne dépassent pas l’une de ces étapes, tandis que d’autres en sautent une.

Il y a une cause à effet directe entre la durée de l’éloignement du tissu social ou familial et le degré de marginalisation.

3. Age et sexe des enfants des rues

3.1. L’âge

L’âge des enfants de la rue varie d’un pays à l’autre.

Dans les pays en voie de développement, des enfants de moins de 8 ans doivent déjà vivre par leurs propres moyens.

Dans les pays développés, les enfants des rues ont généralement plus de 12 ans.

Généralement, les filles échouent dans la rue à un âge plus avancé que les garçons.

3.2. Le sexe

La proportion de filles est inférieure à 30% dans les pays en voie de développement et de 50% dans la majorité des pays développés.

Dans les pays en voie de développement, les raisons pour lesquels les filles sont moins nombreuses en rue sont les suivantes :

Les filles sont moins souvent abandonnées par leur famille :

  • Dans de nombreuses cultures, elles sont éduquées dès leur plus jeune âge à se soumettre et à prendre soins des autres. Elles posent donc souvent moins de problèmes comportementaux que les garçons.
  • Lorsqu’elles posent problème, les conflits sont généralement plus modérés et n’aboutissent pas à la rupture.
  • Il peut être plus effrayant pour une fille de vivre en rue que pour un garçon, ce qui tempère la décision de quitter sa famille.
  • Des alternatives de logement auprès d’autres familles ou d’amis sont plus facilement trouvées pour les filles que pour les garçons.
  • Lorsqu’une famille veut se « débarrasser » honorablement d’une fille, elle la marie très jeune et elle trouve ainsi un autre foyer.

Elles abandonnent plus rapidement la rue car elles sont :

  • prises en charge par des personnes de la communauté qui les engagent comme domestiques.
  • recrutées pour travailler dans l’industrie du sexe.
  • engagées dans les usines, les ateliers ou les commerces.
  • plus souvent institutionnalisées dans des centres pour enfants car moins rebelles que les garçons.

Elles sont moins « visibles » :

  • Certaines se déguisent en garçon pour échapper à la police, aux services sociaux, aux employeurs ou aux autres enfants.
  • Certaines ne sortent en rue que la nuit.
  • La plupart se prostituent et de ce fait circulent peu de temps en rue (elles satisfont leur client à l’abri des regards).
  • Elles ne vivent pas constamment en rue car elles sont logées par leur proxénète.

Il est important de détecter les filles car :

  • Elles rencontrent plus de difficultés encore que les garçons et sont plus facilement exploitées (industrie du sexe, viols, faveurs sexuelles consenties à d’autres enfants des rues en échange de « protection »).
  • Elles ont généralement moins d’opportunités économiques que les garçons 1.
  • Elles sont moins rémunérées à activité égale.
  • Elles se retrouvent parfois enceintes (risque d’avortement pratiqué dans de mauvaises conditions d’asepsie, problème de santé et risque accru de mortalité du fait de la grossesse précoce) ou mères (charge et responsabilité accrues, pas de prise en charge pour leur enfant).

4. De quoi vivent les enfants des rues ?

Les différentes activités de survie des enfants des rues sont :

  • mendier de l’argent, de la nourriture et d’autres choses (la mendicité est parfois pratiquée en complément d’une activité rémunératrice)
  • récupérer des objets dans les poubelles et les décharges
  • vendre de petites marchandises ou des journaux
  • aider les automobilistes à manœuvrer dans les parkings, garder les véhicules en l’absence des propriétaires
  • laver les voitures ou les pare-brise
  • échanger des devises
  • cirer les chaussures
  • guider les aveugles
  • effectuer des livraisons
  • jongler, jouer de la musique ou exercer d’autres activités saltimbanques
  • se prostituer (pour vivre et se nourrir, pour payer leur drogue)
  • vendre de la drogue et autres produits illicites (généralement sur injonction et surveillance étroite d’adolescents plus âgés ou d’adultes)
  • voler, chaparder
  • etc.

Les activités des filles se limitent généralement à la mendicité et à la prostitution.

Remarques :

– La délinquance :

  • Les comportements délinquants (tels que les vols ou le trafic de drogue) sont à entendre comme mode de survie et non comme mode de comportement.
  • La délinquance n’est pas le type de stratégie de survie le plus répandu dans le monde de la rue.

– La mendicité :

  • Dans de nombreux pays, la mendicité est perçue comme un acte de délinquance parce que déclarée comme telle par la loi.
  • La prostitution :
  • La mendicité est bien moins rentable pour les adolescents que pour les jeunes enfants. Aussi, dès la puberté, un certain nombre d’entre eux se tournent vers une autre source de revenu : la prostitution. La prostitution concerne davantage les filles. Cependant, certains garçons s’y adonnent avec des pédophiles homosexuels.

– Le travail :

  • En dépit des lois nationales et internationales, le travail constitue le principal moyen de survie des enfants des rues.
  • Ces petits métiers, mal rémunérés, harassants et souvent dangereux, ne bénéficient d’aucune protection ou assurance. Ils exposent les enfants aux abus et à l’exploitation de leur employeur.
  • Certains de ces « métiers de rue » ne sont accessibles qu’aux enfants les plus nantis car ils nécessitent une mise de fond (par exemple, pour le cirage des chaussures, le lavage des véhicules, les petits commerces, etc.).
  • Ces « métiers de rue », insuffisamment rentables, ne permettent pas aux enfants de se dégager de leur condition sociale et la majorité d’entre eux reste en sécurité précaire.

5. Les ressources des enfants des rues

On entend par ressources tout ce à qui permet à une personne de satisfaire ses besoins physiques, émotionnels et sociaux.

Ces ressources peuvent être internes (par exemple, la volonté de réaliser un objectif) ou externes à la personne (par exemple, les personnes ou les institutions qui prennent soin de l’individu).

Les enfants des rues disposent généralement de grandes ressources intérieures mais manquent de ressources environnementales (information, famille, éducateurs de rue, organisations communautaires, écoles, formations professionnelles, emplois, services médicaux, activités récréatives, etc.).

Parce qu’ils manquent de support externe, les enfants des rues sont contraints de développer leurs ressources internes et d’en créer afin d’améliorer leur vie.

La survie des enfants dans un environnement aussi difficile que celui de la rue dépend de leurs ressources personnelles et du support offert par le groupe.

5.1. Les ressources personnelles

Les ressources personnelles des enfants comprennent leurs compétences adaptatives et leur capacité de résilience.

On entend par compétences adaptatives, l’habilité à résoudre des problèmes rapidement et de façon efficace avec les moyens disponibles dans l’environnement.
Quotidiennement, les enfants doivent résoudre les problèmes suivants :

  • se loger
  • se nourrir
  • se vêtir
  • se laver, laver leurs vêtements, aller à la toilette
  • se soigner
  • etc.

Pour survive en rue, les enfants ont appris à :

  • à mentir
  • à mendier
  • à voler
  • à se battre
  • à se prostituer
  • à consommer des drogues pour diminuer leurs tensions
  • à fuir, à se cacher
  • à s’évader lorsqu’ils sont arrêtés
  • etc.

Bien que ces comportements puissent être considérés comme anti-sociaux, ils ont une valeur dans la mesure où ils permettent aux enfants de survivre.

Les enfants développent également des moyens de survie plus constructifs. Ils parviennent à trouver :

  • diverses informations utiles
    *-des activités rémunératrices légales
  • des activités récréatives, éducatives ou une formation professionnelle
  • à lire, à écouter la radio ou à regarder la télévision

La résilience est l’habilité à récupérer son équilibre psychique après un choc psychologique et d’autres événements difficiles.

Les caractéristiques individuelles, comportementales et sociales favorisant la résilience et l’adaptation au monde de la rue sont entre autres :

  • la poursuite d’un objectif (par exemple, vouloir aider d’autres enfants des rues)
  • un sentiment d’efficacité personnelle (perception positive de sa capacité à réussir certaines tâches) et d’estime de soi (sentiment de valeur personnelle)
  • une saine capacité à prendre de la distance physique (par exemple, quitter momentanément la maison pour la rue lorsque le père a bu et devient violent) et/ou psychologique (par exemple, ne pas se sentir responsable des problèmes de ses parents) par rapport aux problèmes
  • la capacité à appréhender les situations de façon réaliste (savoir ce qui est réalisable et ce qui ne l’est pas, ce qui peut être changé et ce qui ne peut pas l’être, etc.)
  • la capacité à évaluer régulièrement les situations et à s’auto-évaluer (c’est-à-dire à évaluer les répercussions des événements de sa vie, les relations de cause à effet, etc.)
  • la capacité à reconnaître ses erreurs (tirer des leçons de ses expériences)
  • la capacité à demander de l’aide
  • les capacités intellectuelles (capacité de compréhension, savoir lire, calculer, etc.).
  • les capacités physiques (courir vite, avoir de la force, etc.)
  • l’endurance et la persévérance.
  • les capacités à gérer ses émotions (le self-contrôle)
  • un caractère « facile » (sens de la négociation et du compromis) permet à l’enfant d’établir des relations positives avec d’autres personnes et d’éviter les conflits.
  • le sens de l’humour, l’optimisme, la capacité à réinterpréter les problèmes sous un angle positif permettent souvent de réduire les tensions et de redonner une perspective d’avenir.
  • les capacités de leadership, l’altruisme et l’empathie incitent l’enfant à être en relation avec d’autres personnes.
  • la foi religieuse et les valeurs morales permettent à certains enfants de refuser les comportements nuisibles (se prostituer, se droguer, etc.avoir des responsabilités vis-à-vis de sa famille donne à l’enfant un sentiment d’utilité et de pouvoir (par exemple, s’acquitter des tâches ménagères, prendre soin des frères et sœurs plus jeunes, travailler en rue pour gagner un revenu complémentaire)
  • avoir une relation positive avec des membres de sa famille biologique (un grand parent, un oncle, une tante, etc.), avec une famille d’adoption ou avec un adulte (ami de la famille, professionnel d’une institution ou d’une association, voisin, etc.).
  • Même lorsque l’enfant n’entretient pas de contacts fréquents avec sa famille, elle peut représenter un soutien. En effet, les attentes qu’elle nourrit vis-à-vis de lui peuvent l’aider à lutter pour atteindre ses objectifs ou à renoncer à des pratiques néfastes (par exemple, consommer de la drogue).
  • participer à des rituels ou à des fêtes traditionnelles familiales (même lorsque la famille est dysfonctionnelle), sociales ou religieuses donne le sentiment d’avoir une place dans le monde et renforce le sentiment d’appartenir à un groupe.
  • avoir eu un modèle parental positif dans le passé (même si la personne n’est plus impliquée actuellement dans la vie de l’enfant).
  • avoir l’opportunité de participer à des activités au sein de la communauté (par exemple, enseigner un sport ou une activité artistique à des enfants dans le cadre d’activités parascolaires, devenir un éducateur à la santé, etc.).
  • lorsqu’il poursuit une scolarité, celle-ci peut apporter à l’enfant le soutien de camarades de classe et de professeurs (si l’enfant n’est pas rejeté) et lui donne de l’espoir pour l’avenir.
  • avoir un hobby ou un talent tel que pratiquer un sport, chanter, danser, écrire ou peindre lui procure un sentiment de valeur personnelle et une identité (tant à ses propres yeux qu’à ceux de sa communauté). Cela lui permet également de prendre de la distance par rapport à ses problèmes en favorisant l’expression de ses sentiments.
  • mettre en place des stratégies de survie. Certains enfants tentent de se prémunir des personnes dangereuses (violeurs et racketteurs). Quelques exemples :
    • rester groupés dans certaines circonstances
    • éviter certains lieux à certaines heures
    • déguerpir lorsqu’un abuseur circule dans le quartier
    • proposer au client un lieu offrant une relative sécurité pour pratiquer la prostitution
    • repérer le véhicule du violeur ou du pédophile et donner l’alerte aux autres
    • se soumettre au rapport sexuel lorsqu’ils/elles sont « attrapé(e)s » pour éviter des violences supplémentaires

Plus le jeune possède de capacités citées ci-dessus, moins il aura besoin de recourir à la drogue pour surmonter ses difficultés quotidiennes. Si néanmoins, il en consomme, il sera davantage en mesure de contrôler sa toxicomanie (contrôler la quantité consommée ou éviter les problèmes associés à la consommation).

En bref, les ressources et la résilience des enfants dépendent de leur créativité, de leur force de travail, de leur intelligence et du fait qu’ils puissent se sentir concernés par autrui.

5.2. Les ressources du groupe

Les enfants des rues partageant des besoins et/ou des intérêts communs se rassemblent pour former des groupes.

  • Ces groupes vont du simple cercle d’amis au réseau organisé autour d’une activité rémunératrice commune.
  • Ils sont plus ou moins importants (de quelques individus à beaucoup plus).
  • Ils sont plus ou moins stables (allant du groupe instable, se faisant et se défaisant en fonction des intérêts et des circonstances, au groupe stable dont les membres sont liés à long terme).
  • Ils sont plus ou moins ouverts ou fermés (allant du groupe ouvert à tout nouvel individu partageant les mêmes besoins ou intérêts que le noyau de base au groupe fermé, récalcitrant à intégrer un nouveau membre).
  • Les rapports entre les individus sont plus ou moins égalitaires ou hiérarchisés. Les groupes hiérarchisés sont généralement sous « l’autorité » d’un leader ou d’un porte-parole (généralement un adolescent plus âgé ou un jeune adulte); un rôle est attribué à chaque membre en fonction de ses forces et de ses faiblesses. Selon les cas, les leaders remplissent différentes fonctions :
    • soit, ils protègent les enfants.
    • soit, ils organisent les activités génératrices de revenu, y compris des activités délictueuses ou criminelles (trafic de drogue, commerce sexuel, etc.).
    • soit ils imposent aux enfants les dites activités en échange d’une « protection ».

Le fait de vivre en groupe offre aux enfants divers avantages :

– Un soutien matériel. Les membres du groupe partagent nourriture, vêtements, abri, et substances psycho-actives.

– Un soutien émotionnel, un sentiment d’appartenance à un groupe (les amis d’infortune deviennent une famille de remplacement) et le réconfort de se sentir acceptés par d’autres.

– Une protection. Les membres se protègent mutuellement pour faire face aux situations à risque (rafles policières, raids des gangs, etc.) par le partage des informations, guet, etc.

– Un partage d’expérience. Les enfants « expérimentés » apprennent aux nouveaux venus comment survivre en rue.

6. Une population hétérogène

Comme nous pouvons le constater la population des enfants des rues est hétérogène.

On distingue :

  • Les enfants arrivés en rue pour des raisons familiales et sociales diverses (pauvreté, violence, etc.) ou pour cause d’événements particuliers (catastrophe naturelle, conflit armé, etc.).
  • Les enfants vivant en rue seuls ou avec leur famille.
  • Les enfants dans la rue et les enfants de la rue en fonction des liens subsistant avec une famille.
  • Des modes de survie et des types d’activités lucratives divers.
  • Mais également des formes de sociabilité différentes se distinguant par la taille (groupuscule, bande, réseau, etc.) et par la stabilité (groupe fermé ou ouvert aux nouveaux, groupe stable ou instable, etc.).
  • Etc.

Conséquences négatives et avantages de la vie en rue

Les conséquences d’une vie se déroulant dans les circonstances difficiles de la rue sont multiples.

1. Les conséquences négatives

2.1. Les besoins de base

2.1.1. Les besoins matériels

Les besoins matériels ne sont pas satisfaits :

  • Nourriture insuffisante (certains enfants souffrent de la faim) ou mal équilibrée (malnutrition, anémie, avitaminose, etc.).
  • Manque d’abri, de vêtements, d’hygiène (hygiène personnelle rudimentaire et environnement insalubre) et d’autres besoins de base.

2.1.2. Les soins de santé

– Des risques accrus :

Les besoins en soins de santé ne sont pas rencontrés. Or, la vie en rue accroît les risques pour la santé.

Il existe :

  • Un risque accru de maladies graves dû au manque d’hygiène et aux comportements à risque (maladies respiratoires, problèmes dermatologiques, affections dentaires, maladies parasitaires, infections spécifiques telles que le choléra, la lèpre, la tuberculose, l’hépatite B, etc.).
  • Un risque accru de blessures (accidents, rixes, etc.) et d’intoxications (intentionnelles ou non, y compris celles que l’enfant s’inflige lui-même lorsqu’il est sous l’effet de drogue ou lorsqu’il est déprimé).
  • Un risque accru de problèmes de santé reproductive et sexuelle (activité sexuelle précoce, maladies sexuellement transmissibles dont le SIDA, grossesses involontaires et à risque, avortements pratiqués dans des conditions sanitaires sommaires, manque de suivi anténatal pour les filles enceintes, risque de décès pour les enfants nés en rue, etc.).

Un exemple : A Ouagadougou, capitale du Burkina Faso

Plus d’un tiers des filles des rues de Ouagadougou ont des enfants.
Seules 6% d’entre elles ont désiré leur grossesse.
7% déclarent avoir pratiqué une interruption volontaire de grossesse (IVG) mais probablement que plus de 50% y ont recouru. D’après le Ministère de la Santé, 30 IVG illégales par jour seraient pratiquées sur le territoire burkinabé.
70% des filles enceintes demandent une IVG.
Les filles les plus jeunes (15-16 ans) demandent toutes d’avorter.
Les complications diverses suite aux IVG pratiquées de façon clandestine sont :

  • le décès (hémorragie)
  • les infections graves nécessitant une hospitalisation et pouvant entraîner la mort (septicémie). Il n’est pas rare que le personnel hospitalier néglige gravement une jeune patiente lorsqu’il suspecte que son problème de santé est une conséquence d’un avortement (négligence entraînant souvent le décès).
  • la stérilité (certaines filles s’en plaignent)
  • la dyspareunie

Lorsque la grossesse (désirée ou non) est menée à son terme, on constate que :

  • les bébés sont de petit poids (bien que naissant à terme) et sont donc plus fragiles (notamment aux infections).
  • ils font l’objet de négligence grave et sont victimes de maladie entraînant la mort dans les toutes premières années de leur vie dans plus de 50% des cas.
  • Lorsque les bébés grandissent et deviennent moins faciles à gérer, les filles font plus difficilement face à leur responsabilité de mères.
  • Lorsqu’elles retournent en rue après l’accouchement, les filles confient leur enfant à des femmes plus âgées qui pour être tranquilles gavent les bébés de sédatifs (pouvant entraîner le décès de l’enfant).

(données recueillies lors d’une mission effectuées par l’auteur)


– Les enfants et la santé :

La santé est rarement une préoccupation majeure pour les enfants des rues car :

  • Ils s’estiment invulnérables.
  • Ils sont concentrés en permanence sur l’« ici et maintenant » (les problèmes de logement et d’alimentation sont prioritaires).
  • Ils sont peu préoccupés par les conséquences à long terme de leur comportement.

Cette attitude est renforcée par le fait que nombre d’enfants sont généralement en bonne santé.

– Enfants et demande de soins :

  • Les enfants des rues peuvent être préoccupés par leur santé mais croire qu’ils sont capables de se débrouiller seuls ou avec les conseils de leurs amis (conseils souvent erronés).
  • Les enfants en mauvaise santé sont peu enclins à demander de l’aide. En effet, être malade ou être préoccupé par sa santé, c’est se montrer faible et différent de ses compagnons. Or, être différent, c’est courir le risque d’être rejeté.
  • Les enfants fréquentent peu les structures de santé pour diverses raisons :
    • Dans leur quête d’indépendance, les enfants tendent à rejeter les valeurs des adultes et à s’aligner sur celles de leurs pairs. Il leur est donc difficile de se soumettre à un système de santé contrôlé par les adultes.
    • Il n’existe pas de service de santé à proximité.
    • Les soins sont trop onéreux. Lorsqu’il est possible d’obtenir la gratuité des soins, les démarches à effectuer sont méconnues, trop complexes ou trop longues.
    • Lorsque les structures de soins existent, les enfants des rues y sont souvent mal accueillis.
    • Ils peuvent ne pas avoir confiance dans les structures de soins car ils craignent que des policiers ou des agents de la protection de la jeunesse les y attendent pour les capturer et les placer en institution. En Russie, la loi impose que les mineurs d’âge non accompagnés soient placés en institution. Aussi, lorsqu’un enfant des rues de Moscou recourt à des soins de santé hospitaliers, il est retenu dans un hôpital « fermé » (sorte de prison). Ensuite, lorsque son état le permet, il est placé dans une structure d’accueil. La méfiance des enfants vis-à-vis des structures de santé peut donc être tout à fait justifiée.
    • Les enfants peuvent avoir le sentiment qu’ils ne seront pas soignés correctement (« On n’en vaut pas la peine », manque d’estime de soi). De plus, l’avenir leur semblant sans espoir, il leur paraît inutile de faire des efforts pour leur santé (résignation).

2.2. Les besoins émotionnels

Les besoins émotionnels, affectifs et psychologiques ne sont pas satisfaits :

– La négligence et la violence familiales : lorsque des contacts sont maintenus avec des membres de la famille, ceux-ci, préoccupés par leurs propres difficultés (difficultés économiques, maladie, deuil, traumatisme psychique, etc.), ne donnent pas à l’enfant les soins et l’attention dont il a besoin. Par ailleurs, certains enfants subissent ou ont subi avant de quitter leur famille de fréquentes punitions corporelles et de mauvais traitements (notamment lorsque les parents sont en état d’ébriété).

– Les expériences de perte et de séparation : les enfants rescapés, déplacés, les enfants orphelins ou non accompagnés, les enfants battus ou abusés peuvent avoir manqué de structure familiale et communautaire dès leur plus jeune âge. La rue perpétue ce manque de support émotionnel et matériel.

– L’absence d’intimité.

– Les différents stress auxquels ont été soumis (stress post-traumatique suite à une catastrophe naturelle ou à un conflit armé) ou sont soumis (combat pour la vie, contexte violent, etc.) les enfants des rues les rendent vulnérables aux problèmes émotionnels, aux désordres psychiatriques et aux difficultés d’apprentissage pour lesquels ils ne reçoivent pas les soins nécessaires.

– Des responsabilités inappropriées par rapport à l’âge. Les enfants se voient forcés d’assumer des responsabilités d’adulte pour lesquelles ils ne sont pas prêts. Par exemple, certains enfants orphelins ou non accompagnés assument leur(s) frères(s) et sœur(s) plus jeunes ; de très jeunes filles deviennent mères, etc.

Les besoins en terme de sécurité ne sont pas remplis :

– Le monde de la rue est un environnement violent par les agressions qu’il subit de l’extérieur et par le type de relations qu’entretiennent les individus entre eux. Il expose les enfants à l’exploitation par autrui, aux blessures voire à la mort.

– Les sources de violence sont :

  • la police. Par exemple, les filles des rues étant généralement clandestines, elles sont régulièrement raflées par la police 2 et souvent violées durant leur garde à vue. Les garçons, arrêtés pour vol ou autres méfaits, sont souvent battus, voire tués, durant leur incarcération.
  • Les autorités religieuses, claniques, ethniques ou officielles. Ce sont généralement les autorités du pays ou de la ville qui décident des mesures, souvent brutales, concernant les enfants des rues (rafles, déportation dans les campagnes, incarcération, placement en institution).

Un exemple : Le Mohro Naaba, autorité ethnique et religieuse

En 2003, des garçons des rues vivant sur le terrain situé devant la demeure du Mohro Naaba sise à Ouagadougou (autorité suprême des Mossi du Burkina Faso) ont été victimes d’un pédophile violeur (il utilisait un couteau pour contraindre ses jeunes victimes). Ils ont uni leurs efforts pour lui tendre un piège et le punir. Ils l’ont ligoté, exposé nu aux regards des passants et l’ont obligé à reconnaître publiquement ses méfaits. Les « vieux » (les sages) ont demandé aux enfants de libérer leur prisonnier car « il était inconvenant qu’un homme de cet âge soit nu au vu de tous ». Le chef Mossi (converti à la religion musulmane), après avoir tenu un conseil avec les « vieux », a chassé les enfants les menaçant de mort s’ils restaient sur le site car ils avaient profané un lieu sacré par des pratiques sexuelles interdites (la sodomie) !


  • les gangs
  • les escadrons de la mort
  • les dealers
  • les responsables et les clients du commerce sexuel. Il n’est pas rare que des jeunes filles des rues soient victimes de clients pervers et violents. Il arrive qu’elles soient séquestrées et violées durant plusieurs jours, voire tuées.
    la famille
  • les autres enfants des rues. Les rixes entre enfants sont fréquentes. Les enfants rackettent ou volent leurs compagnons lorsque ceux-ci ont gagné quelque argent dans la journée (par exemple, les filles sont souvent délestées de l’argent qu’elles ont gagné en se prostituant). Les plus jeunes (garçons et filles) sont régulièrement victimes d’abus sexuels de la part de leur aînés (protecteur ou non).
  • les habitants des quartiers dans lesquels séjournent les enfants. Les vindictes populaires sont un exemple de cette violence. Lorsqu’un enfant est surpris en flagrant délit de vol, c’est toute la population présente qui se précipite sur lui pour le molester, généralement jusqu’à ce que mort s’ensuive.

Certains viols et certains meurtres sembleraient liés à des prescriptions de marabouts.


Un exemple : Les Mossi du Burkina Faso

Chez les Mossi du Burkina Faso, lorsqu’un homme perd deux épouses en couches, il peut lui être prescrit de violer une femme loin de chez lui. Ce viol garantirait la santé de ses épouses futures, la victime portant désormais la malédiction sur elle. A Ouagadougou, certains cadavres retrouvés mutilés de façon particulière font penser qu’il s’agit de meurtres rituels (langue et sexe sectionnés).


2.3. Les besoins sociaux

La vie sociale normale est interrompue :

  • Les enfants ne peuvent plus jouer, se concentrer ou apprendre comme le font les autres enfants. Ils sont concentrés sur la satisfaction de leurs besoins primaires.
  • L’apprentissage des règles sociales et morales est interrompu (la notion de « bien » et de « mal » devient floue).
  • L’apprentissage scolaire est interrompu et les enfants ne peuvent accéder à une formation professionnelle (même lorsque la scolarité est gratuite, les enfants ne peuvent y accéder en raison du coût des vêtements et du matériel scolaire).
  • Les enfants qui fréquentent l’école le font de manière sporadique et sont l’objet de rejet de la part des professeurs, des autorités et/ou des autres étudiants.
  • Les activités récréatives sont interrompues.
  • Les activités professionnelles s’exercent dans de mauvaises conditions et les enfants sont exploités.

Les enfants migrent souvent (d’une ville à l’autre, d’un quartier à l’autre au sein d’une même ville). Il s’agit parfois d’un choix personnel mais généralement, ils y sont contraints pour échapper aux rafles policières, aux gangs, etc. Ce type de vie entraîne un isolement social et entrave le développement de liens affectifs stables.


Un exemple :

Dans certains pays, lorsqu’un événement important se déroule (sommet de la Francophonie, festivals cinématographiques, coupe de football), les autorités nettoient la ville de ses mendiants, de ses prostituées et de ses enfants de rues. Ceux-ci sont raflés et déplacés en périphérie de l’agglomération ou placés en institution.


Le rejet et la stigmatisation par la communauté :

– Les enfants des rues sont souvent perçus par la société comme des fauteurs de troubles. Les gens pensent généralement qu’ils sont incontrôlables et violents, qu’ils sont toxicomanes, qu’ils n’ont pas de morale, qu’ils sont incapables de ressentir des émotions positives telles que l’amour et que ce sont des graines de terroriste, de révolutionnaire, de voleur ou de criminel.

De plus, ils sont tenus pour responsables de leur situation, leurs parents n’étant pas mis en cause.

Le sujet des abus sexuels étant particulièrement tabou dans de nombreux pays, les enfants des rues qui en sont victimes sont considérés comme coupables (cf. l’exemple du Burkina Faso, le Mohro Naaba).

– Cette stigmatisation se manifeste dans divers lieux :

  • dans les quartiers où les enfants évoluent
  • à l’école
  • dans les structures de soins de santé
  • dans les magasins
  • dans les bureaux de police
  • etc.

Parfois, les enfants intériorisent cette stigmatisation et se vivent « mauvais », « inutiles » ou « sans valeur ».

La vie en rue mène immanquablement à :

  • Une absence de modèles sociaux positifs auxquels les enfants peuvent s’identifier (manque de figures parentales ou familiales, manque de professeurs ou d’autres modèles d’enseignement, etc.).
  • Une absence d’attachement positif avec, pour résultante, une déprivation émotionnelle et sociale.
  • Des attachements négatifs à des adultes ou à des adolescents plus âgés qui tirent avantage, permettent ou encouragent des comportements à risque, accroissant ainsi la vulnérabilité des enfants (parents violents ou abusifs, personnes associées au trafic de drogue ou au commerce sexuel, employeur exploiteur, etc.).
  • Un besoin de reconnaissance de la part des pairs. Les enfants des rues, plus que les autres enfants et adolescents, ont besoin de se sentir acceptés par les membres de leur groupe.

2.4. La drogue

On entend par substance psycho-active tout produit consommé affectant la façon de ressentir, de penser, de voir, de goûter, de sentir, d’entendre et de se comporter d’un individu.

De 25 à 90% des enfants des rues consomment des substances psycho-actives. Ce pourcentage varie considérablement en fonction de la région du monde, du sexe et de l’âge de l’enfant.

2.4.1. Types de drogue

Les substances psycho-actives consommées par les enfants des rues sont généralement facilement disponibles et bon marché.

– Par exemple :

  • La colle, dans les régions de fabriques de chaussures.
  • Les solvants, dans les zones industrielles.
  • La cocaïne, dans les zones de production de la coca.
  • L’opium et l’héroïne, dans les régions de productions de l’opium.
  • Divers solvants et aérosols, différents alcools, la nicotine, le cannabis et les produits pharmaceutiques (stimulants, hallucinogènes, sédatifs, etc.), dans de nombreuses régions du monde.

Le risque de dépendance est variable en fonction du type de drogue.

Dans de nombreux endroits, les enfants des rues consomment plus d’un type de substance (soit en même temps, soit à des moments différents).

Dans de nombreuses sociétés, les enfants sont exposés très jeunes à diverses substances, en particulier celles disponibles ou associées au travail (colle, essence, cannabis, tabac, alcool).

2.4.2. Drogue et sub-culture

La consommation de drogue (en particulier d’inhalants) est directement en relation avec la sub-culture de la rue. La disponibilité des substances psycho-actives, l’influence des membres du groupe voire, dans certains cas, la pression des dealers, favorisent la consommation de drogue. La drogue devient rapidement un des aspects de la vie en rue, voire même fait partie intégrante de celle-ci. Elle procure un statut aux enfants au sein de leur communauté.

Contrairement au toxicomane des pays développés pour qui la consommation abusive de drogue est généralement la cause de sa présence en rue, pour les enfants des rues, elle en est, le plus souvent, la conséquence.

Dans les pays développés, le stéréotype du toxicomane est un adolescent malheureux, dépressif et opposé à toute autorité. Généralement, les enfants des rues des pays en voie de développement sont sympathiques, affectueux et respectueux de l’autorité. Ils consomment des drogues non pas parce qu’ils rejettent la société mais plutôt parce qu’ils y ont perdu leur place.

La drogue se consomme souvent en groupe et se partage.

2.4.3. Un rôle fonctionnel

Les drogues sont consommées par les enfants des rues parce que :

  • elles ajoutent quelque chose à leur vie (par exemple, du plaisir).
  • parce qu’elle leur permet de résoudre temporairement un problème (par exemple, diminuer la sensation de faim).

Pour la majorité des enfants des rues, la consommation de drogue remplit donc un rôle « fonctionnel ».

  • Il y existe une relation entre les problèmes de la vie en rue et les effets produits par les substances consommées (par exemple, entre la difficulté à s’endormir dans un environnement bruyant et l’effet sédatif d’une substance).
  • Le type de drogue est choisi en fonction de la situation ou de l’effet recherché.

Les fonctions attribuées à la drogue sont multiples :

  • Elle permet de se divertir, de rêver, d’oublier les mauvaises expériences.
  • Elle aide à lutter contre l’angoisse, la dépression et l’ennui.
  • Elle permet de rester éveillé (pour travailler ou pour alerter le groupe d’un danger) ou de s’endormir (dans un environnement bruyant et surpeuplé, dans la froid ou dans la chaleur, malgré les piqûres de moustiques, etc.).
  • Elle aide à supporter la faim, le froid ou la douleur.
  • Elle donne le courage de mendier, de voler ou de s’adonner à la prostitution.
  • Elle donne du courage lors des premiers rapports sexuels.
  • Etc.

Souvent, les substances ne produisent pas exactement l’effet désiré et elles laissent les enfants encore plus désemparés émotionnellement, en plus mauvaise santé et avec moins de moyens financiers qu’auparavant.

En raison de cette utilité, les enfants se montrent généralement peu motivés à stopper leur consommation.

La consommation « fonctionnelle » de drogue est souvent contrôlée et se limite à des circonstances ou des situations spécifiques.

Cependant, la drogue consommée régulièrement pour faire face aux difficultés du quotidien peut entraîner une dépendance. Un cercle vicieux s’instaure ainsi ; les jeunes se prostituent pour gagner l’argent nécessaire (ou volent pour obtenir cet argent) à l’achat de la drogue ; la drogue est consommée pour soulager les souffrances associées au fait de se prostituer (ou pour donner le courage de voler) et ainsi de suite.

Lorsqu’ils deviennent dépendants d’une substance psycho-active, ils contrôlent peu leur consommation et la poursuivent en dépit des conséquences négatives. De plus, ils consacrent de plus en plus de temps à gagner de l’argent pour se procurer leurs doses (notamment en se prostituant) et les consommer.

2.4.4. Drogues et exploitation

Certains exploitants du commerce sexuel utilisent les substances psycho-actives pour contrôler ceux qu’ils exploitent et ce de diverses manières :

  • Ils contrôlent l’accès à la drogue. Cette méthode est particulièrement efficace pour contrôler le comportement des victimes fortement dépendantes d’une substance.
  • Ils fournissent de la drogue en récompense d’un comportement désiré.
  • Ils droguent une personne de sorte qu’elle n’oppose pas de résistance à être exploitée ou recrutée dans l’industrie du sexe.

Parfois, les jeunes qui se prostituent consomment de la drogue pour pouvoir augmenter leurs activités ou pour diminuer les douleurs lors des rapports sexuels. Ils consomment la drogue de leur propre initiative ou sont forcés par les exploitants.

2.4.5. Les risques

Les risques sont de différents ordres :

Pour la santé physique :

L’usage de drogue entraîne un risque de dépendance, d’une hausse de consommation, d’une escalade vers des drogues de plus en plus « dures » ainsi que d’overdose.

L’usage de drogue entraîne un risque d’infection (par le HIV, l’hépatite et autres pathologies contagieuses en cas d’injection par intraveineuse), de troubles respiratoires ou de brûlures (pour les drogues fumées), d’accidents (par perte de vigilance), de violence, de grossesses non désirées, de relations sexuelles non protégées, etc.

A terme, il existe des risques de dommage pour le cerveau et le foie.

Pour la santé mentale :

L’usage de drogue entraîne des troubles mentaux ou aggrave des troubles préexistants (troubles de la mémoire et de la concentration, dépression, tristesse, sentiment d’isolement, propension au suicide), y compris des troubles psychotiques et des désordres organiques.

Parce qu’elle aide les enfants à diminuer leurs tensions, la consommation de drogue (notamment les inhalants) limite le développement de stratégies de coping 3 plus constructives.

Au niveau social :

Les jeunes faisant usage de drogue n’assument pas certaines responsabilités qui leur incombent (par exemple, ils ne parviennent plus à travailler).

Les enfants des rues font constamment face à la difficulté de trouver l’argent nécessaire à l’achat de leur drogue. Certains volent ou recourent à la violence, s’engagent dans l’industrie du sexe ou rejoignent le commerce illégal.
Ils sont souvent rejetés ou exclus des services sociaux, de leur famille, de leur emploi, etc.

Ils peuvent rencontrer des problèmes légaux (comportements sous influence, délits commis pour obtenir les substances).
Ils peuvent être exploités et violentés par les dealers et les responsables du trafic de la drogue.

Les enfants les plus vulnérables risquent d’être enrôlés volontairement ou sous la contrainte dans la fabrication, le trafic, la distribution et la vente de drogue.

Les enfants les plus vulnérables (manque de ressources internes et externes, contexte problématique) risquent de consommer des drogues de plus en plus « dures » et de développer une dépendance de plus en plus grande.

L’usage de substances psycho-actives augmente ou induit d’autres comportements à risque (comportement sexuel à risque, comportement délinquant, etc.).

2.5. La sexualité

2.5.1. L’adolescence

Bien que l’âge moyen des enfants des rues varie d’une région du monde à l’autre, la gamme d’âge concernée par cette problématique inclut toujours la période de l’adolescence.

La malnutrition et les conditions de travail pénibles peuvent inhiber la croissance et retarder la puberté.

L’adolescence est source de nouveaux stress.

  • Les changements survenant à l’adolescence exposent les jeunes à des pressions de plus en plus fortes. Les garçons, surtout, subissent des pressions constantes de la part de leurs pairs. En effet, les expériences sexuelles sont perçues comme la réalisation et la démonstration de la masculinité et de la virilité.
  • Dans certaines régions, les jeunes filles masquent leur féminité car elles craignent d’être harcelées ou agressées sexuellement.
  • La mendicité devenant moins rentable pour les adolescents, ceux-ci recherchent d’autres sources de revenu, notamment la prostitution.
  • Les jeunes filles sont dépourvues d’informations quant à leurs menstruations (hygiène 4, douleurs, aménorrhée, risque de grossesse, etc.).
  • Filles et garçons ne reçoivent pas d’informations sur la sexualité et sur la manière de prévenir les grossesses. Même lorsque les adolescents ont conscience des moyens de prévenir les grossesses, ils n’y ont généralement pas accès (indisponibilité de moyens contraceptifs, inaccessibilité financière, etc.).

Les changements physiques (principalement la taille et la force) sont valorisés. En devenant plus grands et plus forts, les jeunes sont moins fréquemment abusés (notamment par d’autres enfants des rues) et peuvent trouver de meilleurs gagne-pain (les plus jeunes sont souvent moins payés et forcés de travailler de plus longues heures). Admirés par les plus jeunes, ils deviennent des leaders.
Ces changements physiques peuvent être particulièrement difficiles à vivre lorsque les enfants ont subi des abus et des violences sexuelles ou lorsqu’ils ressentent un attrait sexuel pour les personnes du même sexe.

Bien que les changements physiques, sociaux et psychologiques les plus importants surviennent à l’adolescence, l’activité sexuelle des enfants des rues commence souvent avant cette période.

2.5.2. Différents types de sexualité

L’activité sexuelle recouvre des significations différentes selon les contextes dans lesquels elle s’exerce.

– Le sexe « de confort »

  • Les enfants des rues ont grand besoin de combler l’absence de relations affectives normales qu’une famille aurait pu leur donner. La sexualité devient un des moyens de recevoir de l’affection, de combler la solitude et de se sentir accepté.
  • Tout comme la drogue, la sexualité aide les enfants à oublier leurs soucis, à diminuer leur anxiété, à se relaxer et à trouver du plaisir.
  • Parfois, les garçons décrivent les relations sexuelles comme « un jeu entre amis ».

– Le sexe comme pouvoir

  • Parfois, les enfants des rues font abusivement état de leur sexualité pour asseoir leur pouvoir.
  • Certains garçons ont ou prétendent avoir des relations avec des prostituées. Avoir des rapports sexuels atteste de leur force, de leur virilité et prouve qu’ils sont de « vrais hommes ».
  • La sexualité est utilisée par certains enfants pour en contrôler d’autres et pour faire respecter la « hiérarchie » de la rue.

– Le sexe comme initiation

  • Ce type de sexualité est utilisé comme rite de passage et d’initiation d’un nouveau membre au sein du groupe.
  • Les victimes sont traitées avec violence lorsqu’elles résistent.
  • Pour de nombreux enfants, ce type d’expérience est admis comme inévitable.

– Le sexe commercial/la prostitution

  • Les enfants ont des relations sexuelles en échange d’argent.
  • Cet argent leur permet de subvenir à leurs besoins et/ou à ceux de leur famille et/ou de payer leur drogue.
  • L’enfant peut prendre seul la décision de se prostituer, y être contraint par sa famille ou y être poussé par les dealers de drogue.

– Le sexe de survie

  • Ces relations sexuelles « de survie » sont le résultat d’une relation abusive exercée par autrui.
  • Souvent, les enfants consentent à des rapports sexuels pour obtenir un logement, de la nourriture et d’autres besoins de base ainsi qu’une « protection ».
  • Il est fréquent que des garçons soient exploités par des hommes adultes.

– Le sexe comme punition

  • Lorsqu’un enfant ne respecte pas les « règles » du groupe, il peut être puni en étant violé.

2.5.3. Comportements à risque

Les enfants des rues sont exposés quotidiennement à des situations qui les rendent vulnérables aux problèmes de santé sexuelle et reproductive. Cette vulnérabilité est accrue par leur manque de compréhension et par l’insuffisance de leur connaissance par rapport à ces changements physiques. Ces carences les empêchent de faire des choix éclairés en matière de sexualité et de recourir aux services de santé appropriés.

Rapports sexuels non protégés

Les rapports sexuels non protégés sont les plus fréquents parmi les enfants des rues. Même lorsque les préservatifs sont disponibles, les enfants ne les utilisent pas pour les rapports qu’ils ont entre eux. Par exemple, les filles des rues ont des rapports non protégés avec leur proxénète (généralement un aîné de la rue).

Les enfants qui se prostituent n’osent refuser les rapports sexuels non protégés par crainte de perdre leurs clients. Certains clients paient davantage si la fille accepte les rapports sexuels sans préservatif.

Les risques de contracter une infection sexuellement transmissible (HIV/SIDA, syphilis, gonorrhée, hépatite, etc.) sont accrus du fait que les partenaires habituels des enfants ont des rapports sexuels sont souvent à haut risque (personnes aux partenaires multiples ou partageant le matériel d’injection de la drogue).

Activité sexuelle et abus de substance psycho-actives

La consommation de drogue influence le comportement sexuel. Lorsque les personnes sont sous influence de la drogue, les risques sont accrus :

  • de ne pas utiliser de préservatif.
  • de ne pas refuser un rapport.
  • de faire usage de la force (viol) pour obtenir un rapport sexuel.

Drogue et alcool sont souvent consommés pour donner du courage lors des premiers rapports sexuels, en particulier par les garçons.

Les conséquences des comportements sexuels à risque

Grossesses non désirées et à risque (complications à l’accouchement pouvant entraîner un risque pour la santé voire pour la vie de la mère et de l’enfant, prématurité, bébés de petit poids à la naissance plus fragiles aux maladies et aux infections, etc.)

Avortements pratiqués dans de mauvaises conditions d’hygiène (risque d’infections, d’hémorragie, décès)

HIV/SIDA et infections sexuellement transmissibles

2.5.4. Violences sexuelles

Les violences sexuelles sont fréquentes dans le monde de la rue.
Filles et garçons courent des risques similaires.

Les auteurs de ces violences sexuelles peuvent être des étrangers ou des personnes connues des enfants, voire d’autres enfants 5.

Ces violences peuvent également être perpétrées au sein de la famille. Lorsque les abus se sont produits au sein de la famille, l’enfant a le plus souvent été également exposé à d’autres formes de violence (violence physique, psychologique, négligence).

Généralement, l’enfant ne dénonce pas les violences sexuelles dont il est victime. Pour s’y résoudre, il doit avoir une bonne estime de lui et une relation de confiance avec un adulte.

2. Les avantages de la vie en rue

Pour certains enfants, la rue constitue un moyen de résoudre leurs problèmes familiaux. En effet, la vie en rue leur offre certains avantages :

  • Elle permet de se faire des amis.
  • Elle donne un sentiment d’appartenance à une nouvelle famille, généralement vécue comme bienveillante comparée à la famille biologique.
  • Elle offre un degré de liberté inaccessible en famille.

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WHO, “Working with street children. Module 5. Determining the Needs and Problems of Street Children”, World Health Organization, Mental health determinants and Populations, Department of Mental Health and Substance Dependence, Geneva, 2000 (WHO/MDP/00.14)

WHO, “Working with street children. Module 6. Responding to the Needs and Problems of Street Children”, World Health Organization, Mental health determinants and Populations, Department of Mental Health and Substance Dependence, Geneva, 2000 (WHO/MDP/00.14)

WHO, “Working with street children. Module 9. Involving the Community”, World Health Organization, Mental health determinants and Populations, Department of Mental Health and Substance Dependence, Geneva, 2000 (WHO/MDP/00.14)

WHO, “Working with street children. Trainer Tips”, World Health Organization, Mental health determinants and Populations, Department of Mental Health and Substance Dependence, Geneva, 2000 (WHO/MDP/00.14)

WHO, “The Rapid Assessment and Response Guide on Psycho-active Substance Use and Especially Vulnerable Young people”, Substance Abuse Department, World Health Organization, Geneva, 1998

Documents joints

Notes et références

  1. Hormis la prostitution.
  2. La prostitution est illégale dans de nombreux pays. Elle l’est systématiquement pour les mineurs d’âge.
  3. Les stratégies de coping représentent les efforts cognitifs et comportementaux d’une personne pour gérer (réduire, tolérer, contrôler) les demandes (internes et externes) d’une transaction stressante.
  4. Par ailleurs, les conditions de vie ne permettent généralement pas de respecter les règles d’hygiène adéquates.
  5. Les filles des rues sont fréquemment sexuellement abusées par leur « protecteur », généralement un aîné de la rue.